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Brancher l'Afrique : quelles solutions pour accélérer l'accès à l'énergie et améliorer les conditions de vie

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Cet évènement a été l’occasion d’une annonce conjointe du Groupe de la Banque mondiale et du Groupe de la Banque africaine de développement (BAD) : les deux institutions s’associent dans le cadre d’un effort ambitieux visant à fournir un accès à l’électricité à 300 millions de personnes en Afrique d’ici 2030. La Banque mondiale s'emploiera à raccorder 250 millions de personnes par le biais de systèmes d’énergie renouvelable décentralisés ou de réseaux de distribution, tandis que la BAD soutiendra 50 millions de personnes supplémentaires. Lire l’annonce

Plus de 500 millions d’habitants en Afrique subsaharienne pourraient être toujours privés d’électricité en 2030 — parmi elles, près de 400 millions vivront dans des pays en proie à la fragilité, aux conflits et à la violence. Le Groupe de la Banque mondiale a déjà commencé à déployer des solutions financières et techniques innovantes qui sont essentielles pour accélérer les taux d’électrification et rattraper la croissance démographique. Sans accès à une énergie fiable, abordable et durable, la région ne pourra pas concrétiser ses aspirations au développement ni opérer une transformation économique indispensable pour sortir des millions de personnes de la pauvreté. 

Comment développer à grande échelle les solutions et investissements nécessaires pour raccorder à l'électricité des millions d’habitants en Afrique et transformer les économies de la région ? Cette question a été le fil rouge de cet évènement phare rassemblant, autour du Groupe de la Banque mondiale, partenaires de développement, acteurs du secteur privé et ministres de pays africains. 

Au cours d’une première table ronde, des représentants du secteur privé ont mis en lumière des exemples de collaboration réussie entre secteurs public et privé pour la promotion de solutions énergétiques durables en Afrique. Le deuxième panel, qui réunissait plusieurs ministres, ainsi que des représentants du FMI et de la BAD, s’est penché sur la manière dont les dirigeants africains et leurs partenaires de développement peuvent surmonter les obstacles qui entravent la réalisation des objectifs d’accès à l’énergie.

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Conversation informelle (20 minutes)

Avec le président du Groupe de la Banque mondiale, Ajay Banga, et le président du Groupe de la Banque africaine de développement, Akinwumi Adesina.

1er panel : Solutions collaboratives (40 minutes)

Table ronde de représentants du secteur privé destinée à mettre en lumière des exemples de collaboration réussie entre secteurs public et privé pour la promotion de solutions énergétiques durables en Afrique.

  • Hans Olav Kvalvaag, directeur général, Release by Scatec
  • Folake Soetan, directrice générale, Ikeja Electric
  • Patrick Walsh, cofondateur et directeur général, SunKing
  • Hassanein Hiridjee, directeur général, Axian Group
  • Lucy Heintz, associée et responsable de l’infrastructure énergétique, Actis

2e panel : Surmonter les obstacles (40 minutes)

Table ronde destinée à encourager l’action des dirigeants africains et de leurs partenaires de développement en faveur de la réalisation des objectifs d’accès à l’énergie.

  • Abdessalam Ould Mohamed Saleh, ministre de l'Économie et du Développement durable, Mauritanie
  • Ernesto Tonella, ministre des Finances et de l’Économie, Mozambique
  • Kevin Kariuki, vice-président Électricité, énergie, climat et croissance verte, Banque africaine de développement
  • Mohammed Amin Adam, ministre des Finances, Ghana
  • Abebe Aemro Selassie, directeur du département Afrique, FMI

[Nozipho Tshabalala]
Bonjour, soyez les bienvenus. Nous avons deux heures ce matin. Nous avons des experts en différentes langues qui seront ici avec nous pour évoquer ces différentes questions. Bienvenue donc à cette 24ᵉ réunion de printemps FMI Banque Mondiale. Nous allons parler de l'électrification de l'Afrique. Le président de la Banque Mondiale, Ajay Banga, et le président de la Banque africaine de développement, monsieur Akinwumi Adesina, vont nous rejoindre sous peu pour évoquer leur projet en matière d'accélération de l'électrification en Afrique. Mais tout d'abord, voyons comment l'Afrique peut énergiser son propre avenir. Merci.

[Vidéo]
Au quotidien, dans toute l'Afrique, le manque d'accès à l'énergie affecte au quotidien les particuliers, les entreprises et les services essentiels. Il leur faut constamment s'adapter pour surmonter ce défi. La dure réalité est que près de 600 millions de personnes à travers le continent n'ont pas accès à l'électricité. Comment l'Afrique peut-elle alimenter son avenir ? L'électricité joue un rôle essentiel pour alimenter le développement économique, créer de l'emploi et accéder à une meilleure éducation et à de meilleurs services de santé. Son rôle est également vital pour assurer la connectivité, stimuler l'innovation et une croissance solide. C'est la clé qui permettra de libérer le plein potentiel de l'Afrique. Sans électricité, un avenir plus équitable, prospère et compétitif restera hors d'atteinte. Grâce au progrès technologique et à l'innovation, il est désormais possible d'étendre l'accès à l'électricité et de permettre ainsi de transformer la vie des Africains et des Africaines et les économies du continent. Mais pour y parvenir, des milliards de dollars d'investissement seront nécessaires pour permettre l'accès universel à l'électricité d'ici 2030. Ce défi offre l'opportunité d'un changement transformateur, l'opportunité de faire progresser les réformes, d'améliorer l'accès à l'électricité au réseau et hors réseau et d'attirer les investissements privés pour accélérer les progrès. Gouvernements, entreprises, partenaires du développement et particuliers : le moment est venu d'unir nos forces. Ensemble, électrifions l'Afrique pour faire de l'accès universel à l'énergie une réalité et permettre un avenir meilleur pour tous et pour toutes.

[Nozipho Tshabalala]
Quel bel appel à l'action pour un avenir plus équitable, prospère et compétitif pour l'Afrique. J'ai le plaisir d'accueillir le président du groupe de la Banque Mondiale, Ajay Banga, et bien sûr, le président de la Banque africaine de développement, Akinwumi Adesina. Soyez les bienvenus. Si je puis tout d'abord vous poser cette première question, messieurs, si vous pouviez, nous décrire l'urgence, l'importance de l'accès à l'énergie en cela que ça permet la transformation économique en Afrique, comment présenteriez-vous ce défi et les possibilités qui se présentent à nous ?

[Ajay Banga]
Merci tout d'abord, Akinwumi Adesina. Merci de partager la scène avec moi. C'est la personne que j'ai rencontrée en premier lorsque j'ai participé à mon processus de nomination, quand je suis allé à Abuja. Il est la première personne que j'ai rencontrée, donc je suis vraiment ravi pour cette raison qu'il soit avec moi aujourd'hui. Il y a 600 millions de personnes sur le continent africain qui n'ont pas accès à l'électricité, à une quelconque forme d'électricité. C'est inacceptable en 2024. Je crois que l'électricité constitue un droit humain. L'électricité constitue finalement le socle sur lequel l'on peut avoir accès à la santé, à l'éducation, accès finalement à la possibilité d'innover, de fabriquer et d'être productif. Si vous n'avez pas d'éducation, vous n'avez pas de santé. Si vous n'avez pas de productivité, vous n'avez pas d'emploi. Il n'y a pas de solution à la pauvreté et à la croissance et au développement sans électricité. Ainsi, pour moi, l'électrification de la société, c'est l'essentiel. J'ai grandi en Inde et j'ai constaté les changements dans mon propre pays qu’ont amenés l'expansion de l'accès à l'électricité. Je l'ai vu au cours de mon enfance. Je suis conscient de cela, dans ma chair. Je pense qu'il faut envisager cela comme un droit humain, qui nous permet de faire naître des emplois et des possibilités en Afrique. Je suis convaincu que l'avenir de l'Afrique, que l'emploi des jeunes, dépend de cinq grands domaines: Akinwumi Adesina et moi en avons parlé lorsque nous nous sommes entretenus la première fois, comme je l'ai évoqué. Premièrement, l'énergie. Si vous commencez à parler de production d'énergie, c'est important, mais il faut que l'énergie soit distribuée. Deuxièmement, Infrastructures. Aéroports, ponts, routes, etc. Troisièmement, le système agroalimentaire et la sécurité alimentaire. C'est une grosse partie de l'endroit où se trouveront les emplois. Quatrième, le tourisme. L’Afrique a une grande chance. Il y a d'énormes possibilités d'expansion du tourisme et de l'emploi dans le tourisme. Il y a un certain nombre de pays africains où c'est déjà le cas. Et enfin, cinquièmement, les soins de santé. La santé. On entendra beaucoup parler au cours des réunions de cette année de la santé. L'électricité, c'est une source d'emploi et sans électricité, sans accès à une énergie abordable, on ne pourra rien faire.

[Nozipho Tshabalala]
Merci beaucoup, Ajay Banga, pour ces mots, ces propos liminaires très puissants. L'énergie, effectivement, est le socle de tout développement économique. En particulier, vous dites que c'est effectivement la priorité numéro 1, la priorité numéro 2 et la priorité numéro 3, l'électrification. Akinwumi Adesina, j'aurais la même question à vous adresser. Comment envisagez-vous la chose ? Et peut-être pouvez-vous faire écho aux propos d'Ajay Banga ?

[Akinwumi Adesina]
Merci. Effectivement, j'ai rencontré Ajay Banga lorsqu'il a été nommé et nous avons évoqué trois choses. Premièrement, il m'a dit: Il faut résoudre les problèmes électriques de l'Afrique. Deuxièmement, il faut bien sûr que l'Afrique étoffe son industrie. Et troisièmement, la création d'emplois. Mais on ne peut pas créer d'emplois sans énergie et sans économie. L'énergie, c'est le sang dans le corps. Une économie a besoin d'électricité, a besoin d'énergie. Et l'économie se développe au gré du développement de l'énergie parce que c'est la force vitale de l'industrie. Aucune économie ne saurait prospérer dans le noir. C'est une belle formule, Effectivement, aucune économie ne peut prospérer dans la pénombre. Et l'économie africaine en a marre de ne pas être éclairée dans la lumière. Et c'est devenu une situation presque normale, alors qu'elle est totalement anormale, mais nous y sommes habitués. Je me souviens dans les années 80, quand j'étais étudiant au Nigeria, nous n'avions pas d'électricité. J'étais à l'université et j'habitais dans la maison d'un couple qui accueillait des étudiants. J'ai pris ma valise et j'ai commencé à repasser mes habits. Le père me disait: « Pourquoi ça fait une heure que tu fais ça ? » Je lui ai dit: « Peut-être que l'électricité va s'éteindre d'un moment à l'autre, donc je vais le faire maintenant. » L'accès universel à l'électricité en Afrique est essentiel. Ajay Banga le disait, c'est un droit humain. Et surtout, c'est un sentiment de fierté qui doit être le nôtre. Je ne veux pas être le continent de la pénombre.

[Nozipho Tshabalala]
Akinwumi Adesina, vous disiez que le sang même de l'économie, c'est l'énergie. Aucune économie ne saurait être compétitive sans électricité. Ainsi, comment peut-on justement faire preuve de volonté, de dignité. Ajay Banga, face à ces propos, j'aurais une question: comment allons-nous y parvenir ? Et qu'est-ce que la Banque mondiale, cette institution, peut faire ? Comment peut-elle s'inscrire dans cette solution pour changer la donne ?

[Ajay Banga]
Je crois que le problème, nous l'avons contemplé sous tous les angles depuis longtemps. 600 millions de personnes sans accès à l'électricité, ça n'est pas arrivé hier. Ce n'est pas nouveau. Akinwumi Adesina l'a évoqué avec moi lors de mon premier déplacement. On le savait. Après, je ne connaissais pas nécessairement le chiffre. Et ça a été effectivement une information importante quand je l'ai rencontré. Mais il nous faut aller au-delà de cette contemplation, du problème, pour rendre possible des résultats concrets. Je pense que ce que nous allons vous dire aujourd'hui, nous allons vous parler de notre engagement. Au cours de la COP 28, nous avons pris l'engagement, la Banque mondiale a pris l'engagement de connecter 100 millions d'Africains et d'Africaines d'ici à 2030 à des sources d'électricité abordables. Aujourd'hui, nous voulons multiplier cet engagement en mobilisant toutes les parties de la Banque mondiale dans toutes les régions de l'Afrique. Pour que cela fonctionne, nous allons multiplier cet engagement pour atteindre 250 millions de personnes d'ici à 2030, 250 millions sur 600. Akinwumi Adesina, c'est quelqu'un qui a de grandes ambitions. Donc lui, il regarde déjà au-delà de 50 millions. Mais parlons déjà de 250 millions. Si vous pouvez atteindre 300 millions sur 600 millions d'ici à 2030, ce serait fabuleux. C'est le type d'engagement qu'il faut prendre. Mais pour cela, il va falloir consentir d'énormes efforts de toute la Banque mondiale. Il va falloir consentir des efforts en matière de financement, en matière de collaboration avec les États, en matière de collaboration avec le secteur privé également. Nous allons évoquer cela, mais pour moi, c'est vraiment le chiffre à garder en tête : 250 millions, 300 millions, c'est la proposition sur la table pour 2030, 300 millions de personnes qui auraient accès à une énergie abordable.

[Nozipho Tshabalala]
Oui, effectivement, si nous arrivons à 300 millions, c'est un chiffre énorme. Reprenons là-dessus. C'est un effort de grande ampleur. Vous avez d'ores et déjà dit qu'il fallait mobiliser toutes les parties de cette banque, les États, le secteur privé. Qui sont les autres parties prenantes pour que cela se concrétise ?

[Ajay Banga]
Je pense que nous allons avoir besoin de trois facteurs : de l'argent, bien sûr, du financement. Notre estimation pour les 250 millions, c'est 35 milliards de dollars. Il faut de l'argent de l'Association de Développement International, qui est notre bras de financement pour les nations les plus nécessiteuses. Il y aura un renflement de ce fonds d'ici à la fin de l'année. Si ça se fait, une bonne partie de ces fonds seront fléchés vers l'électrification de l'Afrique. Deuxième facteur, il faudra que le secteur privé se mobilise parce qu'on ne peut pas le faire sans leur participation. Le secteur privé, pour qu'il se mette en ordre de bataille, il faut que les États le fassent également. Il faut que les entreprises publiques puissent payer les producteurs. Il faut que les entreprises énergétiques aient les capacités d'avoir de la trésorerie, d'être rentables. Je ne dis pas qu'il faut augmenter les prix de l'énergie pour les plus pauvres. Nous sommes convaincus tous deux de l'importance des filets sociaux et du soutien social, de l'assistance sociale. Mais comme mon voisin est du Nigeria, il le connaît. On voit qu'au Nigeria, il y a justement cet effort de ne pas faire peser les coûts sur les couches les plus défavorisées de la société. Il nous faut également de la sécurité réglementaire et une clarté au niveau des prix de l'électricité et dans la gestion également des entreprises énergétiques et des lignes de distribution et de transmission. Donc du financement, les États et troisièmement, le secteur privé. Nous menons un certain nombre d'initiatives. Nous avons lancé des garanties qui sont à un niveau bien plus élevé que ce que nous avons fait par le passé. Nous avons ouvert nos capacités de garantie auprès d'autres banques multilatérales, notamment en Inde.

[Nozipho Tshabalala]
Il y a une série d'initiatives. Ce sont des ingrédients qui seront essentiels pour garantir que la recette prenne. Vous avez évoqué l'environnement réglementaire, la structure de tarification d'électricité. Akinwumi Adesina, vous avez été présenté comme une personne qui a de grands rêves et de grandes ambitions. Quels sont ces rêves ? Quelles sont ces ambitions ? Que souhaitez-vous ajouter ?

[Akinwumi Adesina]
Tout d'abord, nous devons envisager les chiffres. 600 millions de personnes, on a dit que c'était inacceptable. Il faut partir de cela et créer un plan sur cette base. Par exemple, la Banque africaine de développement en 2016, après que j'ai été élu pour la première fois, j'ai évoqué justement l'électrification. Nous avons lancé une nouvelle donne pour l'électrification de l'Afrique, avec comme but d'y arriver d'ici à 2025. Il nous fallait être ambitieux parce que la situation était tellement honteuse. On savait que c'était très ambitieux, mais nous nous sommes lancés. Nous avons travaillé avec tout le monde au niveau international. Ce qui s'est passé, c'est que nous avons pu faire passer le taux d'accès à l'électricité de 32 % à 45 %, donc une augmentation d'environ 25 %, et ça a nécessité 8,9 milliards de dollars, ce qui nous a permis de connecter 22 millions de personnes de plus à l'électricité en Afrique. Très bien. Cependant, je suis allé voir Ajay Banga et effectivement, nous avons parlé d'ambition grande. Et pour faire cela, je ne pouvais pas demander un meilleur partenaire qu’Ajay Banga et la Banque mondiale. Notre message, c'est qu'à la Banque africaine de développement, nous allons garantir que nous pourrons fournir accès à l'électricité à 50 millions de personnes d'ici à 2030. Mais en plus de cela, nous devons également mobiliser le potentiel énergétique qui est le nôtre. Je dois dire que Dieu nous est plutôt clément. Le soleil, c'est gratuit. Nous avons 11 térawatts de potentiel. On n'utilise que 1 %. Nous avons 215 gigawatts d'hydroélectricité et nous avons l'énergie géothermique. Nous avons également l'énergie éolienne, 1,15 gigawatts. Nous avons décidé que le mieux que l'on pouvait faire, c'est de lancer une grande initiative pour l'énergie solaire en Afrique. Nous avons lancé une grande initiative pour électrifier l'Afrique du point de vue solaire. C'est un investissement à hauteur de 25 milliards de dollars qui va permettre de créer 10 000 mégawatts dans les zones telles que la Mauritanie, le Burkina Faso, le Sénégal, l'Éthiopie et même l'Érythrée. Alors qu'est-ce que permettra cette initiative ? Cela nous permettra d'arriver au chiffre de 250 millions de personnes qui auront accès à l'énergie. Si vous y ajoutez les 50 millions que j'ai évoqués un peu plus tôt, c'est 300 millions. Et ça revient à ce qu’Ajay Banga disait. Nous serons enfin capables de passer à autre chose et de mettre cela derrière nous. Et si nous pouvons y arriver dans les temps, Ajay et moi pourrons être ensemble et chanter la chanson de Jimmy Cliff, « J'y vois clair maintenant. » Nous avons surmonté tous les obstacles.

[Ajay Banga]
Je pense qu'ils nous pourront déjà nous féliciter de cette référence. Lui, il sait chanter. Moi, je ne vais pas m'y mettre, sinon ça ne me fait pas très bien.

[Nozipho Tshabalala]
Oui, j'allais justement vous donner le micro. Merci messieurs. J'allais vous poser une question de plus sur la musique, mais nous en resterons là. Je pense que trois mots ressortent à cet égard, Akinwumi Adesina : plus grand, plus ambitieux et meilleur. Ce que j'entends, c'est qu'il y a également un quatrième mot qui commence, non pas par un B en anglais, mais par un T, « together », « ensemble ». C’est l'essence même du partenariat qui doit se mettre en place. Nous avons entendu les annonces, les engagements que vous avez faits aujourd'hui et il nous faut désormais comprendre quelle est la prochaine étape. Qu'est-ce qui doit être mis en œuvre maintenant pour que l'on constate un réel progrès dès maintenant ? Comment est-ce que vous décririez justement, Akinwumi Adesina, les prochaines étapes ?

[Akinwumi Adesina]
Nous avons fixé un objectif. Nous avons du pain sur la planche pour ainsi dire. Ajay Banga l’a dit, il faut que les États et le secteur privé soient mobilisés. Il faut que les institutions financières multilatérales et les banques de développement et les institutions de dérisquage soient mobilisées. Il faut que l'environnement réglementaire également soit bien en ordre. Il faut des lignes de transmission de l'énergie également. Il faut des processus de consultations multi parties prenantes pour créer une feuille de route. Ajay Banga et moi, nous sommes mis d'accord cette année avec l'Union africaine pour la création du Sommet africain de l'énergie, donc État, secteur privé, grandes banques de développement multilatérales, les régulateurs et tous les parties prenantes pertinentes pour ce sommet. Il nous faut créer un pacte énergétique pour l'Afrique. Il y aura une feuille de route qui examinera les questions de financement, les questions réglementaires. Et ça m'enthousiasme parce que nous avions déjà fait cela pour l'alimentation l'année dernière, lorsque le président Macky Sall du Sénégal et moi-même, ainsi que la Commission de l'Union africaine, ont organisé le Sommet sur la sécurité alimentaire en Afrique. Et nous avons développé un pacte alimentation et agriculture. L'idée, c'est de faire exactement la même chose avec l'énergie. Pourquoi ? Parce que lorsque nous avons fait cela l'année dernière, Ajay Banga, la Banque mondiale, la Banque africaine de développement, nous avons réussi à mobiliser 72 milliards de dollars dans ce contexte. Donc nous allons ensemble travailler avec la Commission de l'Union africaine pour ce sommet pour créer une feuille de route très claire qui permettra de mobiliser des financements pour concrétiser justement ces engagements pour l'Afrique. C'est le mieux qu'il y a à faire maintenant parce que cela permettra de transformer le visage de l'Afrique, de ses écoles, de ses entreprises. Voilà, le Sommet énergétique pour l'Afrique.

[Nozipho Tshabalala]
C'est une feuille de route très claire pour l'action. Ajay Banga, comment réagissez-vous aux propos de monsieur Akinwumi Adesina ?

[Ajay Banga]
Nous allons focaliser le sommet sur les trois domaines que nous avons identifiés. Il y a l'objectif d'atteindre la date de 2030 et il va falloir planifier correctement. Les choses vont évoluer à mesure qu'on avance, selon les pays, mais en tant que professionnels du développement, nous devons travailler avec ce qu'on a, mais nous devons nous concentrer sur les unités de mesure. On va mesurer le produit de ces efforts et on va travailler à cet égard avec les gouvernements. Il faut vraiment se concentrer pour faire les choses comme il faut. On va faire tout ce qu'il faut pour que l'objectif actif soit atteint.

[Nozipho Tshabalala]
Merci beaucoup. Il est important de passer aux actes. Merci beaucoup, messieurs. On ne va pas chanter aujourd'hui, mais c'est vraiment utile ce que vous avez dit. Merci beaucoup, Akinwumi Adesina. Merci beaucoup, Ajay Banga. Passons maintenant à des chiffres importants que nous devons manipuler. Premier chiffre, 83 %. On a parlé de 83 % de la population mondiale qui n'a qui n'a pas accès à l'électricité et qui vit en Afrique subsaharienne. Nous avons entendu dire que cela veut dire que si on continue comme par le passé, les communautés africaines ne vont pas s'en sortir. Cela représente 600 millions de personnes qui vivent sans électricité aujourd'hui. Cela signifie que ces personnes sont en dehors de l'économie et n'ont aucune opportunité. Comme l'a dit Ajay Banga, il est vraiment d'accroître l'accès à l'électricité pour 250 millions d'habitants de l'Afrique. Parce qu'aujourd'hui, 300 millions de gens doivent avoir accès à l'électricité. Il va falloir connecter 50 millions de personnes supplémentaires du côté de l'Afrique et 250 du côté de la Banque mondiale, ce qui donne un total de 300 millions de personnes. C'est absolument possible et c'est vraiment un objectif qui nous inspire tous pour que nous nous joignons à cet effort qui vise à électrifier l'Afrique. Maintenant, mesdames et messieurs, nous allons inviter d'autres intervenants à partager leur perspective de la question. Nous avons un panel qui va se joindre à nous. Permettez-moi de vous présenter monsieur Hans Olav Kvalvaag, qui est le directeur général de Release by Scatec, madame Folake Soetan, qui est directrice générale d’Ikeja Electric, monsieur Patrick Walsh, qui est directeur général et cofondateur de Sun King, et monsieur Hassanein Hiridjee, qui est directeur général d'Axian Group. Veuillez les applaudir, s'il vous plaît. Hans Olav Kvalvaag, commençons par vous. On a entendu Ajay Banga et Akinwumi Adesina, et ils ont partagé des idées qui vont revenir dans cette conversation. Ma question est la suivante : comment est-ce que l'innovation dans la technologie et dans la gestion des contrats, comment est-ce qu'on peut donner au pays cette capacité de production d'électricité ?

[Hans Olav Kvalvaag]
Premièrement, je tiens à vous remercier de nous avoir invités pour parler de ces questions qui sont si passionnantes pour nous. Commençons par les bonnes nouvelles. À savoir que la technologie n'est pas le principal problème ici. La révolution du secteur de l'énergie solaire et des batteries solaires nous donne des opportunités considérables pour électrifier toutes les régions de l'Afrique. Nous avons aussi toutes sortes de technologies qui utilisent l'électricité de diverses sources. Il y a aussi des questions de lignes de transmission, mais l'énergie solaire et le coût faible de cette énergie, nous donnent d'autres opportunités dont le problème est beaucoup plus un problème de risque commercial et de risque financier. Alors, comment atténuer ces risques ? Parce que les personnes qui ont le moins accès à l'électricité, c'est les personnes qui n'ont pas les moyens d'y accéder. Le problème que nous constatons, c'est que nous dépensons beaucoup d'argent sur le financement et la structuration des projets, et les projets deviennent de plus en plus coûteux. C'est pour ça que nous essayons de développer l'énergie solaire en Afrique, primordialement en Afrique du Sud et en Égypte. Et nous avons des programmes à cet égard. Pour le reste de l'Afrique et en matière d'électrification, nous essayons d'offrir une solution sur laquelle nous travaillons avec la Société financière internationale et la Banque mondiale. Et nous essayons de produire quelque chose qui ressemble à ce qui est fait dans le secteur des énergies renouvelables. On essaye de produire quelque chose qui est simple, qui est modulable. Nous essayons d'installer les choses plus rapidement. On a moins de risques, on a moins de garanties. Il y a plusieurs solutions que nous essayons de mettre en place pour produire des projets de 50 mégawatts. On a un projet au Cameroun de 57 mégawatts. On essaie de simplifier la façon de procéder pour rétablir ces des sources d'énergie. Nous y reviendrons certainement. Et le soutien des deux messieurs qui viennent de quitter la scène est indispensable pour y parvenir. Mais il y a beaucoup d'outils qui existent qui permettent de réaliser l'électrification de l'Afrique et je suis assez optimiste à cet égard.

[Nozipho Tshabalala]
Vous avez parlé des gens qui sont les plus à risque et vous dites qu'il y a des solutions pour rendre l'accès à l'énergie universel, dont la technologie, qui, selon vous, n'est pas un problème. C'est l'une des premières suggestions que vous avez faites. Mais passons à Folake Soetan. On a parlé de la distribution des énergies renouvelables. Il est important d'échelonner l'accès à l'énergie. Il me semble qu'on a la possibilité de faire des choses phénoménales, mais comment faire pour atteindre 600 millions de personnes ?

[Folake Soetan]
Merci beaucoup, c'est un plaisir d'être ici. La mise en place du système réglementaire de l'électricité au Nigeria a permis d'adopter des lois, de modifier la Constitution et on a procédé aussi à un réexamen des tarifs. Et c’est l'une des choses qu'on a faites pour améliorer la distribution de l'énergie en Afrique. Et on a constaté qu'il fallait procéder à des processus de décentralisation, notamment. Et on se rend compte qu'on va compter de moins en moins sur les réseaux de distribution anciens. On va avoir de plus en plus des systèmes décentralisés, des solutions qui sont enchâssées dans le tissu économique pour atteindre les régions qui sont les moins couvertes en matière d'électricité aujourd'hui. On a adopté une loi en 2023 qui vise à étayer ce processus. Nous avons un système qui nous permet de produire de l'électricité et de produire 603 mégawatts. Et une bonne partie de cette production provient des sources renouvelables. Et pour parvenir à ces objectifs, on est tenus de travailler ensemble. On est obligés de collaborer avec les producteurs de l'énergie qui ne font pas parti du système traditionnel. Quand on met en place un cadre réglementaire adéquat, on commence à avoir des résultats. Ce qu'on va aussi constater, c'est qu'avec ce cadre réglementaire, on va avoir des producteurs privés qui vont se joindre à l'effort pour qu'on puisse produire en dehors des circuits traditionnels. Voilà donc la démarche qu'adopte le Nigeria et nous sommes optimistes.

[Nozipho Tshabalala]
Vous voulez dire que s'il y a un cadre réglementaire qui soutient ces efforts, on va pouvoir mobiliser le financement pour promouvoir l'électrification. C'est ce genre de choses que les gouvernements peuvent faire pour parvenir aux objectifs qu'on poursuit. On passe au troisième panéliste. Les personnes ciblées vivent dans des régions à faibles revenus et des régions pauvres et c'est la partie de la population qui est le plus à risque. Comment est-ce que votre entreprise pense abattre la barrière du coût et rendre l'électricité abordable ?

[Patrick Walsh]
La Banque mondiale travaille avec les gouvernements éclairés en Afrique pour obtenir ce genre de résultat. Notre organisation qui s'appelle Sun King est l'une des plus grandes compagnies qui travaillent en dehors des circuits habituels. Nous fournissons l'énergie solaire de maison à maison et de façon indépendante, en dehors des circuits de distribution traditionnels. On a réussi à électrifier les domiciles de 105 millions de personnes dans le continent africain. L'une des choses qu'il faut faire, c'est qu'il faut créer des emplois. Nous avons 27 000 agents de terrain qui s'occupent d'installer des dispositifs d'énergie solaire dans tout le continent. Et ce sont des endroits où il y a peu de possibilités d'emplois. Et cette création d'emplois verts fonctionne très bien. Le secteur privé, comme on l'a dit, il y a près d'un milliard de gens qui n'ont toujours pas accès à l'électricité. Alors quel est le problème ? Nous devons accroître le rythme de d'installation de l'énergie solaire par un facteur de 10. Et le facteur crucial, c'est que les gens payaient 100 % des coûts des systèmes solaires à partir de leurs propres ressources. Les gens qui ont des ressources limitées devront payer de leur poche ce coût. C'est un problème, mais le coût d'achat de ces systèmes est modeste. Peut-être 100 dollars par maison, ce qui est modeste. Et nous essayons aussi d'accorder un financement pour pouvoir accéder à ces ressources. Récemment, il y a eu un changement révolutionnaire. Quelques gouvernements se sont rendus compte que l'énergie solaire distribuée est le moyen le plus efficace d'électrifier l'Afrique. En travaillant avec la Banque mondiale, par exemple, nous avons eu un programme de subvention pour aider les citoyens à accéder à l'énergie solaire et cette subvention était de l'ordre de 40 %. Cette réduction de 40 % pour les consommateurs finaux a produit des résultats spectaculaires. Avant ce programme, il y avait moins de 20 000 ménages qui bénéficiaient du système. Et après cette subvention, on s'est retrouvé à 80 000 ménages qui étaient électrifiés. Nous avons besoin de financements publics supplémentaires, accrus, pour obtenir ces résultats. Nous avons constaté que les pouvoirs publics peuvent épargner de l'argent en procédant à ce genre de connexion d'énergie électrique. Ces programmes ne coûtent pas trop cher. Pour les 100 millions supplémentaires de bénéficiaires de ce système, il va falloir dépenser beaucoup moins que par le passé.

[Nozipho Tshabalala]
Vous avez parlé de l'ampleur des mesures qu'il faut prendre pour faire des progrès sensibles. Je voudrais vraiment souligner qu'il est important de comprendre l'ampleur de l'écart et de trouver les moyens d'y remédier. Pour ajouter à ce que Patrick Walsh a dit, Hassanein Hiridjee, votre organisation a dépensé de façon généralisée dans près de 20 pays africains. Qu'est-ce qui vous a motivé pour promouvoir l'accès à l'électricité ? Et qu'est-ce que vous considérez comme étant les synergies entre l'accès à l'énergie et d'autres initiatives du même ordre ?

[Hassanein Hiridjee]
Merci beaucoup. Bonjour à tout le monde. Merci pour l'invitation. Je suis ravi d'être ici. C'est vraiment super de vous retrouver ici pour discuter de cette question. Est-ce que nous sommes vraiment sérieux ? Aujourd'hui, en 2024, on parle en Europe, aux États-Unis, de l'intelligence artificielle, on parle de changer de mode d'interaction. Mais en Afrique, on en est encore à discuter de l'accès à l'électricité. C'est terrible. L'écart est considérable. Nous savons absolument qu'aujourd'hui, nous ne pouvons pas avoir de développement économique, social, accès à l'éducation, santé. On ne peut pas faire ça sans électricité. Et c'est ça ma motivation. C'est ma responsabilité en tant que membre du secteur privé africain, de contribuer à l'édification d'une infrastructure pour les Africains, par les Africains. Et nous avons besoin de vous pour y parvenir. La solution est là. Et c'est déprimant de savoir que la solution est là et que nous ne l'utilisons pas. Nous sommes actifs dans les services financiers, dans l'énergie et dans d'autres secteurs. En Afrique, nous savons qu'on établit des milliards de connexions de télécommunications, mais utilisons les synergies qui existent comme dans le secteur des télécommunications. Il faut libéraliser le secteur en premier lieu. Deuxièmement, qu'est-ce qui s'est passé ? L'accès au financement a été promu. Troisièmement, l'innovation. On peut faire la même chose dans l'accès à l'électricité. Nous avons créé une entreprise dans mon pays, Madagascar, qui s'appelle WeLight. WeLight, qu'est-ce que c'est ? C'est une entreprise qui fournit à 150 villages, ça représente 30 000 ménages, donc 250 000 personnes, grâce à des mini-réseaux, on leur fournit de l'électricité, pas simplement des mini-réseaux, mais également les paiements par téléphone portable, l'accès à l'inclusion numérique, ça fonctionne. La technologie est là. Alors comment faire fonctionner ces choses ? Pour cela, il faut l'appui des États. Il nous faut une action. Il faut joindre le geste à la parole. Arrêtons les blablas. On a travaillé avec 150 villages à Madagascar, au Mali. Les solutions, Elles sont là. Nous sommes motivés. On voit qu'il y a des synergies. On peut avoir des forfaits hebdomadaires, mensuels... Il y a de la souplesse, de la flexibilité pour les clients et les clientes.

[Nozipho Tshabalala]
Vous semblez être passionné. C'est très enthousiasmant. Vous évoquez également le fait d'aller vers une responsabilité pour être motivé, mais se sentir responsable. C'est le sentiment que vous avez émis, Monsieur, et je peux sentir que la salle y répond. Ce que disaient Ajay Banga et Akinwumi Adesina un peu plus tôt, c'est que nous sommes déjà parvenus à faire cela avant. Nous avons la feuille de route. On sait ce qu'il faut faire pour changer la donne. Donc merci pour cet appel à l'action pour joindre le geste à la parole. Lucy Heintz, si je puis me tourner à nouveau vers vous. Actis investit dans un certain nombre de points de la chaîne de valeur. Vous êtes un producteur d'électricité, vous êtes un distributeur d'électricité également, d'électricité solaire pas simplement sur le continent africain, mais sur le plan international également. Est-ce que vous pourriez évoquer pour nous un défi en particulier en Afrique ? Que faut-il faire ? Qu'est-ce qu'il faut surmonter, quel frein faut-il lever pour répondre à l'appel d’Akinwumi Adesina ? Et encore plus important, comment cela permettra un accès plus large à l'énergie sur le continent ? [Lucy Heintz]
Je vais répondre à votre question, mais je vais peut-être évoquer également quelles sont les raisons des succès que nous avons constatées autre part. Parce que les autres intervenants et intervenantes ont raison, les technologies sont là, les programmes sont là. Et depuis 20 ans, nous avons investi 10 millions de dollars dans plus de 200 projets énergétiques, 25 producteurs d'énergie, des technologies de stockage, des technologies commerciales également. Nous avons vu des succès. Et je souhaitais peut-être souligner ce qui a déjà été souligné, à savoir que tout d'abord, il nous faut des politiques énergétiques claires, réglementation, législation pour qu'il y ait des modèles de revenus pour le secteur privé. Un portage politique à long terme pour qu'il y ait une prévisibilité de ces réglementations. Un plan pour les secteurs industriels et des environnements réglementaires propices. Pour répondre à votre question, je pense que ce qui manque dans le casse-tête à l'heure actuelle, la pièce qui manque, c'est une approche dite programmatique, à long terme. Cette approche programmatique, c'est ce qui pourra cimenter la confiance et justement faire venir le secteur privé. Si je puis vous donner l'exemple de l'Inde. Ajay Banga en a parlé un peu plus tôt. L'Inde a de grandes ambitions en matière de transformation énergétique. 500 gigawatts d’ici à 2030. Il y a un grand investissement qui a été réalisé. Le secteur privé est très mobilisé. Il y a un partenariat public-privé concernant la transmission d'énergie pour que l'énergie arrive jusqu'aux clients et clientes. Et il y une approche programmatique pour la mise sur le marché pour avoir une sécurité dans le temps. Et on a constaté que les plus grands investisseurs en matière d'infrastructures au monde arrivent sur ce secteur et ils soutiennent justement ces ambitions indiennes en matière énergétique. Et ces financements sont disponibles pour les projets également en Afrique. On a entendu au cours de la COP 28 qu'il y a justement un fonds pour le Sud global à cet égard. Donc nous en appelons justement à cimenter la confiance et à faire venir le secteur privé au fil des années.

[Nozipho Tshabalala]
Effectivement, une approche programmatique, qui permettra de cimenter la confiance au fil du temps. C'est un exemple très pratique et je crois que la salle comprend bien l'importance de cela. Si je puis passer à un autre cycle de questions. Hans Olav Kvalvaag, je repasse à vous. On a évoqué le fait qu'il faut que les États jouent leur rôle, il faut que les agences de développement jouent leur rôle. Comment est-ce que votre entreprise interagit avec les agences de développement et avec les États ? Et si vous pouviez peut-être souligner quelque chose à l'égard de ces interactions qui est facteur de succès.

[Hans Olav Kvalvaag]
Les collaborations avec les institutions sont bien sûr essentielles. Sans elles, on ne peut pas faire décoller nos projets et nos modèles économiques. C'est la raison pour laquelle nous travaillons avec la Banque Mondiale et avec la Société Financière Internationale. C'est la raison pour laquelle nous sommes ravis d'être ici également. J'ai été très heureux de voir les deux premiers intervenants, le président de la Banque Mondiale et le président de la Banque africaine de développement, être ensemble tous les deux parce que bien sûr, ces deux institutions jouent un rôle essentiel. Et je soulignerai deux choses essentielles en matière de coordination. Concernant les garanties, tout d'abord. On sait et on entend que l'électrification fonctionne et se développe, mais ce serait beaucoup plus simple si, en l'occurrence, il y avait des garanties facilement accessibles qui prennent en compte les risques correspondants. Les difficultés que l'on rencontre parfois, c'est que les garanties disponibles essayent d'éviter finalement tout type de risque plutôt que d'affronter, d'appréhender les risques qu'elles sont là pour appréhender, les risques que nous ne pouvons pas supporter. C'est un des problèmes. Je crois que ça devrait être simplifié. Et si ces deux personnes, parce que ce sont les deux personnes qui peuvent concrétiser le changement, plus simplifier l'accès à des garanties pertinentes. Je pense qu'on ferait beaucoup de progrès. Pour revenir au programme qui a été évoqué et que Lucy Heintz a évoqué. Je suis d'accord. Nous rencontrons les pays les moins développés, les moins avancés. Nous travaillons avec l'Afrique de l'Ouest, avec l'Afrique centrale et peut-être à des solutions temporaires pour l'instant, mais également à des solutions à plus long terme. Mais l'idée, c'est d'agir maintenant. Qu'est-ce qu'on constate ? Qu'une bonne partie des agences d'aides multilatérales ne sont pas toutes du même avis. Vous avez par exemple la Banque de développement norvégienne qui a ses projets, puis la Banque africain de développement qui veut mettre en place des financements concessionnels pour créer telle infrastructure, ensuite la Banque mondiale qui perd patience. Le fait est que nous, on ne peut pas faire concurrence avec de l'argent gratuit, pour ainsi dire. Il faudrait des priorités très claires du côté institutionnel à cet égard. Pour nous, c'est essentiel pour accélérer le mouvement. Garantie et coordination, ce seront des catalyseurs de la croissance.

[Nozipho Tshabalala]
Garantie et priorité institutionnelle bien arrêtée pour une meilleure coordination, c'est ce que vous disiez. Folake Soetan, si je puis me tourner vers vous. Selon vous, quel doit être le rôle des entreprises privées de mini-réseaux électriques, en matière de coexistence, de collaboration avec les grandes entreprises, les grands énergéticiens au niveau des États ? Je vais vous demander de répondre en deux minutes.

[Folake Soetan]
Tout d'abord, nous ne sommes pas une entreprise de mini-réseaux, nous sommes une entreprise énergétique. Je l'ai dit un peu plus tôt, l'avenir de la distribution au Nigeria sera de toute façon un mélange de solutions centralisées et décentralisées. Le problème, on le sait, le nerf de la guerre, c'est l'argent. Il faut de l'argent pour exécuter les projets, pour avoir accès à cette énergie. Peu importe la région où vous vivez. Je ne suis pas opposée au fait de travailler avec les mini-réseaux, bien sûr, mais le fait est qu'on ne peut pas, par manque de financement, installer les infrastructures nécessaires pour garantir un accès à l'énergie pour tous et pour toutes dans les endroits enclavés, isolés. Le fait est que les solutions de mini-réseaux aident à cela. Donc il faut que les grandes entreprises et les grands énergéticiens travaillent avec les entreprises de mini-réseaux pour ensemble profiter des forces les uns des autres. Les mini-réseaux peuvent justement garantir l'accès à l'électricité pour les régions les plus isolées. Donc la collaboration est essentielle. Deuxièmement, les co-entreprises. Je viens de parler à cet égard des entreprises de capital privé, de fonds privés. Et si vous avez un accord, c'est un accord dans le temps et le cadre réglementaire est là et tout le monde est prêt à travailler. Ce dont nous avons besoin, c'est de financements. J'espère qu'il y a des gens aujourd'hui dans cette pièce qui sont prêts à arriver sur le marché du Nigeria. Les inquiétudes qui avaient cours auparavant concernant les politiques appliquées n'ont plus lieu d'être. Le gouvernement a ses priorités désormais.

[Nozipho Tshabalala]
Oui, c'est important ce que vous dites parce que ça permet d'aller au-delà des tensions perçues. Mais ce que vous dites, il n'y a pas d'opposition à cela. Tout le monde est ouvert d'esprit vis-à-vis de cela. Il faut juste du financement pour lancer l'initiative et tout le monde est prêt à travailler. Je crois que c'est un moment particulièrement enthousiasmant, là où nous en sommes. Patrick Walsh, si je puis me tourner vers vous maintenant. Vous nous avez aidés à comprendre l'importance de l'écart du déficit. Qu'est-ce qu'il faudrait pour que le secteur public et le secteur privé travaillent plus main dans la main pour étendre l'accès à l'énergie, en particulier en matière d'énergie renouvelable distribuée qui, au cours de cette discussion était un élément important.

[Patrick Walsh]
Le secteur privé et le secteur public travaillent déjà dans la main de manière efficace à bien des égards. Ce que nous demandons, c'est que le secteur public travaille avec le public, avec la population, c'est-à-dire soutienne les familles pour que ces dernières puissent payer des produits dont elles ont besoin. Parce que pour l'instant, les systèmes d'énergie solaire pour les maisons, à l'échelle des maisons, ne sont pas abordables. Quand on voit que le coût de 40 %, on l'a vu grâce aux initiatives de la Banque mondiale et du gouvernement nigérian, ça fonctionne. On voit quand on réduit de 40 % le coût de ces énergies renouvelables solaires installées sur les maisons, ça fonctionne et tout le monde les achète. Ces systèmes ne sont pas tout à fait abordables pour ces familles, donc il faut parvenir à baisser le prix. Concernant la collaboration publique-privé, en outre, l'énergie solaire, et vous l'avez évoqué, s'améliore d'un point de vue technologique sans cesse. Les systèmes d'hier pouvaient fournir l'électricité, la lumière ou bien assez d'électricité pour recharger son téléphone portable, mais maintenant, ça a bien changé. Par exemple, le gouvernement du Malawi nous a demandé d'électrifier le système des écoles. Nous avons installé des capacités pour 500 écoles récemment. Et maintenant, au cours des prochaines années, nous allons pouvoir installer des installations solaires pour toutes les écoles du pays, des installations qui permettront de recharger les tablettes également à utiliser dans les écoles. Nous allons travailler également avec les hôpitaux. Donc il faudrait un pouvoir de parité avec le réseau.

[Nozipho Tshabalala]
Ajay Banga a évoqué le fait que l'énergie est une condition sine qua non pour tout développement. Vous avez évoqué l'électrification des écoles, de toutes les écoles au Malawi. C'est particulièrement passionnant. J'ai presque peur de reparler à Hassanein Hiridjee parce qu'il va nous dire que ce n'est pas réjouissant, c'est plutôt déprimant de se dire que ça n'a pas encore été fait, mais c'est tout l'intérêt, d'évoquer ces questions ensemble. Creusons les possibilités. Hassanein Hiridjee, si je puis vous demander de nous parler encore de Madagascar. Vous avez évoqué certaines de vos initiatives là-bas, certains de vos projets. Comment est-ce que vous opérez une expansion de l'énergie là-bas ? Quel est le modèle que vous utilisez pour vraiment concrétiser le changement au bénéfice de vos clientes et de vos clients.

[Hassanein Hiridjee]
À Madagascar, on a essayé deux modèles : le modèle des installations solaires sur les maisons et les mini-réseaux. Chaque système a ses pour et ses contre, ses avantages et ses inconvénients. Sur les mini-réseaux, on pourrait dire que les cycles de vie sont plus longs, que c'est plus productif, que l'on atteint plus de personnes. Le système solaire à installer sur les maisons, l'infrastructure est payée par l'usager final, d'où la question de l'accessibilité financière. Mais vis-à-vis de ces deux technologies, elles doivent être de toute façon décentralisées, numérisées et décarbonées. Les trois D, pour ainsi dire. Ça c'est vraiment essentiel Il faut que ce soit le cas. Donc il faut que ce soit accessible. Il faut que ce soit fiable et que ce soit facile d'accès. Dans les télécommunications, on travaille beaucoup autour de l'expérience usager. Vous en avez sûrement entendu parler. Donc il faut en matière d'accès à l'énergie, que ce soit centré sur le client et la cliente. C'est essentiel. Alors peut-être pour conclure cette discussion à cet égard, comment aller plus vite dans le cadre de nos modèles commerciaux ? Sur la base de notre expérience dans le secteur privé, qu'est-ce qu'on peut voir ? Tout d'abord, Il faut libéraliser le secteur des énergies. Il ne faut pas protéger l'exclusivité de l'opérateur historique et du distributeur historique. Pourquoi ? Dans les télécommunications, tout a été libéralisé et nous avons vu le résultat. La résultante, c'est la numérisation des sociétés. Alors, on me dit : « Ça va prendre trop de temps pour modifier toutes les lois. » Mais qu'est-ce qu'on pourra dire aux générations futures ? On leur dira : « On attendait qu'une nouvelle loi soit promue. » Non, ce n'est pas acceptable. Donc moi, c'est un appel à l'action que j'envoie à ces grand grandes institutions. S'il vous plaît, la Banque mondiale, parlez avec les États, créez des sortes de zones franches. Faisons des projets pilotes sur 120 villages, je ne sais pas, 200 villages. Dans mon propre pays, Madagascar, l’État nous a soutenus et le président de Madagascar a dit : « Allez, maintenant, on y va. Faisons ça rapidement. » On n'a pas été dogmatiques pour dire le kilowattheure est trop cher. Non, au bout du compte, il faut se demander combien coûte le consommateur. Et désormais, le consommateur paye la moitié de ce qu'il payait avant. Deuxièmement, nous avons besoin de prêts concessionnels, sinon ça ne pourra pas se concrétiser. Il nous faut l'appui des institutions. Nous savons que la Banque mondiale essaye de disrupter, et d'aller plus vite. Il nous faut des prêts concessionnels. On ne peut pas avoir des modèles commerciaux sans cela. Vous voulez des nouveaux investisseurs en Afrique, mais ils et elles doivent gagner de l'argent. Il faut faire en sorte que l'on puisse gagner de l'argent tout en faisant le bien. Il nous faut également du financement en devise locale. C'est essentiel. Si on ne peut pas financer notre développement en devise locale, ça sert à quoi J'ai besoin d'avoir accès à des financements en devise locale. Je pense qu'il nous faut aller vite maintenant. Il nous faut créer, comme je le disais, des zones franches. Il faut avoir accès à des prêts concessionnels en devise locale. Ensuite, les investisseurs internationaux viendront. Les fonds privés viendront également, les fonds d'investissement investissement, viendront investir dans l'accès à l'énergie.

[Nozipho Tshabalala]
Lucy Heintz, je regarde votre réaction. Oui, ça a l'air de vous plaire ces propos. Ce que vous faites très clairement, c'est que vous vous attaquez à un problème assez général en Afrique. C'est-à-dire qu'en général, ce qu'on dit, c'est que quand on va tout seul, on peut aller vite, mais quand on veut aller loin, on va ensemble. Ce que vous nous dites, c'est qu'il faut oublier tout ça, finalement, et qu'il faut de toute façon tout faire. C'est aller ensemble, aller vite et aller loin. Il y a un groupe dont nous n'avons pas parlé, ce sont les femmes. Nous connaissons les chiffres. On dit que si l'on est en égalité hommes-femmes, on sait que cela pourra contribuer à hauteur de 12 000 milliards de dollars à l'économie mondiale. Pour l'Afrique, ce chiffre, 163 milliards de dollars. Ça, c'est très bien, mais qu'est-ce qu'on doit faire ? Qu'est-ce que les entreprises énergétiques, en l'occurrence, peuvent faire pour émanciper justement et permettre une participation plus importante des femmes au marché du travail et à l'économie ?

[Lucy Heintz]
C'est essentiel. Oui, les investisseurs veulent gagner de l'argent, mais également créer et faire vivre des valeurs avec les territoires dans lesquels ils sont. Bien sûr, la situation des femmes est essentielle à cet égard. Nous avons évoqué les programmes énergétiques. Il y a également des programmes publics qui ont des obligations en termes de participation des femmes au marché du travail. Premièrement, la participation, effectivement, des femmes dans le secteur de l'énergie. Nous avons un programme d'apprentissage pour les femmes dans l'un des pays que nous travaillons. Deuxièmement, nous formons également 1 000 femmes à l'installation des panneaux solaires. Ce n'est pas du tout un secteur réservé aux hommes. Les femmes peuvent en faire partie et grâce à cette formation, vous créez des compétences transférables qui leur permettent justement de s'émanciper et de gagner leur vie dans ce secteur ou dans un autre. Troisièmement, encore une fois, la formation. Nous avons un partenariat avec la Fondation pour le développement des capacités en Inde pour mettre en place une formation pour partager nos meilleures pratiques et pour amener avec nous tout le secteur.

[Nozipho Tshabalala]
De grands exemples, beaucoup d'exemples et très pratiques. On me dit dans l'oreille que nous n'avons plus de temps pour ce panel. Je vais juste vous demander de me donner juste un message. Demain, nous aurons un tableau qui sera affiché : « To power up Africa ». C'est le début d'une phrase pour énergiser, pour électrifier l'Afrique. Et vous terminez cette phrase. Ce n'est pas un discours, c'est juste une phrase qui sera affichée. « Pour électrifier l'Afrique, il faut… », et c'est à vous de compléter. En général, les gens ne veulent pas être désignés pour répondre à cette question. Donc je me tourne vers vous, Hans Olav Kvalvaag.

[Hans Olav Kvalvaag]
Vos institutions doivent prendre des risques et y remédier.

[Nozipho Tshabalala]
Applaudissements pour monsieur. Folake Soetan.

[Folake Soetan]
Pour électrifier l'Afrique, nous devons avoir accès à des ressources fiables.

[Nozipho Tshabalala]
Applaudissez pour Folake Soetan, Patrick Walsh.

[Patrick Walsh]
Pour électrifier l'Afrique, construisez des systèmes simples pour permettre à toutes les familles d'avoir les moyens de s'électrifier. Donc des systèmes simples pour aider chaque famille, pour lui donner les moyens d'accéder à l'énergie solaire.

[Nozipho Tshabalala]
Hassanein Hiridjee.

[Hassanein Hiridjee]
Électrifions l'Afrique en construisant ensemble des solutions pragmatiques impliquant les organisations financières internationales et les pouvoirs publics. Écoutez-nous, écoutez-nous.

[Nozipho Tshabalala]
Je retiens la dernière partie de votre phrase : « Écoutez-nous. » Lucy Heintz.

[Lucy Heintz]
Pour électrifier, construisez des programmes et des partenariats, et utilisez les ressources financières pour assurer la soutenabilité.

[Nozipho Tshabalala]
Merci Lucy Heintz. Merci beaucoup, merci à tout le monde. C'était vraiment une conversation très intéressante qui nous a donné des exemples pratiques, des exemples réels de ce qu'il faut faire pour électrifier l'Afrique. S'il vous plaît, restez à votre place. J'aimerais maintenant que l'on entende une poétesse ghanéenne. Elle s'appelle Nora Anedobo et on va vous la projeter maintenant.

[Vidéo]
Plus d'un 500 millions de personnes en Afrique subsaharienne vivent sans électricité. Cela représente un Africain sur deux. C'est-à-dire, pour le dire autrement, entre toi et moi, l'un de nous deux doit vivre sans énergie. Je parle pour les filles et les fils qui étudient à la lueur des bougies et pour les pères, les mères, les entrepreneurs dont les rêves s'étiolent dans la grisaille. Je parle aussi pour les nations drapées dans une semi-obscurité. Il est important donc d'actionner l'interrupteur. Et je parle aussi pour mettre au jour l'urgence d'un accès universel à travers tout le continent, parce que l'électricité va au-delà de l'illumination. L'électricité, c'est le carburant de l'innovation, c'est le pouvoir d'habiliter, de donner le pouvoir, c'est l'espoir, c'est le cœur battant de la révolution économique. Alors faites résonner le gong, annoncez l'aurore. La nuit s'achève. Rassemblez les porte-flambeaux, faites appel aux précurseurs, aux innovateurs et aux rêveurs. Joignez-vous à moi à l'heure où nous devons répandre la lumière. Faisons prendre conscience. Allumons le continent. Électrifions l'Afrique.

[Nozipho Tshabalala]
Nora nous rappelle pour qui nous faisons cette conversation : les jeunes, les entrepreneurs et pour toutes les collectivités qui n'ont toujours pas accès à l'électricité et qui n'ont pas d’opportunités économiques. Nous faisons intervenir ici les opérateurs du secteur privé. D'abord, monsieur Mohammed Amin Adam, qui est ministre au Ghana, monsieur le Ministre Ernersto Max Elia Tonela, ministre des Finances du Mozambique et évidemment, monsieur Abdessalam Ould Mohamed Saleh, le ministre de l'Économie et du Développement durable de la Mauritanie. Bienvenue. Et monsieur Abebe Aemro Selassie, qui est le directeur du département Afrique du FMI. Et ensuite, Monsieur Kevin Kariuki, qui est vice-président pour l'énergie et la croissance verte à la Banque africaine de développement. Monsieur Abebe Aemro Selassie, commençons par vous. Je vais vous adresser la première question. Vous savez que les chocs macroéconomiques affectent la capacité des pays à fournir des services à leurs citoyens. Nous savons que cela impacte non seulement les fournisseurs d'énergie, mais également les consommateurs ultimes. Ma question est la suivante : comment le FMI peut-il aider les pays à vraiment protéger les sociétés nationales d'électricité contre tous ces problèmes ?

[Abebe Aemro Selassie]
Ce n'est certainement pas une question facile. Ce qui me frappe en ce qui concerne le secteur énergétique par rapport aux autres, c'est la nécessité d'assurer l'indépendance du secteur en matière de financement. C'est-à-dire qu’il faudrait que ce secteur compte un peu moins sur les pouvoirs publics que par le passé. Il y a une leçon qu'on doit tirer du secteur des télécommunications. Il y a un lien beaucoup plus solide entre l'accès et le service. Il n'en va pas de même dans le secteur de l'énergie. L'une des choses que certains pays ont faite de plus en plus, de mieux en mieux, c'est l'investissement dans des capacités de production. Par exemple, il y a aussi l'ajustement des tarifs. C'est autant de choses qu'il faut examiner. Le lien entre l'investissement dans le secteur et le niveau de prix pour le consommateur. Deuxièmement, à travers les conseils qu'on donne aux pouvoirs publics, c'est qu'on parle de la façon judicieuse d'investir dans le secteur énergétique. Nous souhaiterions que le secteur énergétique soit plus indépendant et moins susceptible de subir des chocs. Et l'une des choses qu'on recommande, c'est de donner plus d'autonomie au secteur énergétique pour leur permettre de fonctionner de façon adéquate.

[Nozipho Tshabalala]
Merci beaucoup. L'exemple des télécommunications revient sans cesse. Et ce que j'entends, c'est qu'il y a une meilleure opportunité de renforcer ce lien entre l'accès et le service. Et que c'est vraiment possible dans le secteur énergétique. Vous avez souligné aussi le besoin des services publics. Nous allons tenir cela en considération. Monsieur le Ministre Mohammed Amin Adam, j'en viens à vous. Vous avez un poste très intéressant parce que vous avez été vice-ministre de l'Énergie et maintenant, vous êtes ministre des Finances du Ghana. Ma question est la suivante : comment est-ce que l'impact budgétaire du secteur énergétique, comment est-ce qu'on peut mieux gérer cela pour réduire les subventions énergétiques des niveaux actuels qui ne sont pas soutenables ? Et deuxièmement, comment est-ce qu'on peut permettre au secteur privé d'investir des fonds nouveaux dans des domaines comme le secteur solaire qui sont prêts à accueillir de tels investissements ?

[Mohammed Amin Adam]
Merci beaucoup. L'impact du secteur énergétique est crucial pour gérer nos finances et pour gérer l'ensemble de notre développement. On a parlé de 9,1 milliards de dollars de déficit dans le domaine des services énergétiques. On ne peut pas utiliser le budget de l'État pour financer ce manque à gagner. C'est quand même 2 % du PIB et c'est pour ça que nous essayons d'envisager de mettre en œuvre des réformes pour amener le secteur énergétique à un certain niveau de soutenabilité financière. Nous sommes en train de mettre en place, depuis 2019, un projet de redressement du secteur énergétique. Il y a un groupe de travail qui est présidé par le vice-président et qui supervise les différentes réformes qui sont en train d'être réalisées pour renforcer le financement du secteur. Nous sommes en train de renégocier certains contrats qui ont été signés avec certains producteurs privés pour réduire le coût, notamment les coûts relatifs à la capacité. On est en train de revoir aussi les tarifs. Il y a un système d'ajustement automatique des tarifs que nous sommes en train de mettre en œuvre pour tenir compte des besoins, de l'inflation et de changements dans l'évolution des modalités de fourniture d'électricité. Nous sommes aussi en train de promouvoir les énergies renouvelables qui représentent à peu près 3,2 % de l'ensemble. Si vous voulez être en mesure de résoudre les problèmes financiers, combien d'énergie hydroélectrique faut-il produire ? Combien d'énergie géothermique pourrions-nous produire ? Combien d'énergie solaire ? Depuis 2022, la Commission de réglementation des services d'électrification a mis en place des systèmes qui ont entraîné une réduction des tarifs. Nous admettons qu'on a des défis, mais en tant que gouvernement, nous voulons aussi montrer aux opérateurs que nous sommes assez audacieux pour prendre des mesures visant à résoudre les défis qui se posent et défis qui inquiètent les investisseurs. On a aussi un moyen de recouvrer les ressources pour pouvoir les investir dans les chaînes de valeur. Pour nous, ça permet de s'assurer qu'il y a un flux financier pour que chaque acteur sur la chaîne de valeur dispose des ressources nécessaires pour faire face à ces coûts. Il est également important de dire que nous avons connu des difficultés dans le mécanisme de recouvrement des coûts, en travaillant avec la banque mondiale, en travaillant avec le FMI, on a mis en place des mesures pour parvenir à nos fins. Par exemple, un audit trimestriel de ces rentrées d'argent dans le secteur énergétique. Nous sommes en train de travailler avec la Banque mondiale dans le cadre d'un programme. La question de remédier au problème financier, ce n'est pas juste un problème de modification des tarifs. Il y a, par exemple, 60, 70 systèmes de compteurs de l'énergie qui ne se parlent pas les uns aux autres, qu'on ne peut pas harmoniser. Donc on veut créer des compteurs normalisés qui vont nous permettre de bien comptabiliser la consommation.

[Nozipho Tshabalala]
Je voudrais revenir à la deuxième question. Vous avez donné beaucoup d'informations, et vous avez dit que c'était important de mettre en lumière les défis auxquels vous étiez confrontés, mais vous avez aussi parlé des initiatives de réforme en ce qui concerne la tarification, en ce qui concerne la réglementation. Il y a des mesures que vous avez prises pour revitaliser le secteur et le gouvernement, est à l'avant-garde de ces efforts. Comment est-ce que vous faites ? Vous semblez être très audacieux ? C'est des exemples concrets d'actions pratiques que vous avez prises pour remédier la situation au Ghana. Monsieur le Ministre Ernesto Max Elia Tonela. Veuillez nous dire ce que vous avez réalisé dans le cadre du Programme national d'électrification, en particulier. D'après vous, qu'est-ce qui vous a permis de réaliser ce succès et ces résultats impressionnants ? Quel est le rôle que votre gouvernement et les partenaires au développement ont joué pour parvenir à ces résultats ?

[Ernesto Max Elia Tonela]
Merci. Nous avons commencé il y a six ans un programme appelé « Énergie pour tous », qui est aligné sur l'objectif d'accès universel. Au début, quand nous avons commencé le programme, seulement 30 % de la population avait accès à l'électricité. Nous avons donc adopté une nouvelle stratégie d'électrification, un plan directeur en matière d'électricité. Il s'agit d'un plan technique qui souligne une vision à long terme. On a défini les besoins d'investissement sur toute la chaîne de valeur. Nous avons aussi mesuré le potentiel énergétique du Mozambique et nous avons essayé de voir quels sont les besoins énergétiques du continent et on voulait renforcer la position du Mozambique comme exportateur potentiel d'électricité. On a aussi pris en compte la densité de la population pour savoir dans quelle mesure ces initiatives étaient soutenables. Nous avons envisagé les facteurs au réseau et hors réseau, parce qu'il était important de s'assurer d'utiliser des régions qui étaient déjà couvertes en matière d'électricité. Nous avons aussi pris en compte les nouvelles technologies pour pouvoir déterminer les différentes modalités d'électrification. Le gouvernement s'est rendu compte qu'il ne pouvait pas tout faire. Et on a jugé que le rôle du secteur privé était crucial dans ce domaine pour assurer une connexion, pour construire des stations de production et au lieu d'avoir des systèmes isolés. Nous avons également accordé de l'attention à la réglementation pour faire en sorte qu'elle soit plus attrayante et pour qu'elle suscite des investissements de la part du secteur privé. Nous avons aussi suscité la contribution de nos partenaires au développement. Cette participation est cruciale, non seulement pour nous mesurer aux autres, pour voir ce qui se fait ailleurs et définir notre voie à nous et permettre la mobilisation des ressources nécessaires à la mise en œuvre du programme. Les résultats montrent que nous avons accru sensiblement la capacité à installer. Nous avons ajouté à peu près 1 000 mégawatts, ce qui est nettement supérieur à la croissance de la demande intérieure.

[Nozipho Tshabalala]
Monsieur le Ministre, c'est vraiment intéressant de voir le lien entre ce que vous avez cité comme indicateur de succès et ce que nous avons entendu dans la conversation. Ce que vous avez présenté comme résultat, résulte de votre interaction avec le secteur privé et ça rejoint ce qu’Ajay Banga et Akinwumi Adesina ont dit au début. Et vous avez aussi parlé de l'idée d'apprendre ce que les autres font, de prendre connaissance de ce que les autres font pour pouvoir vous en inspirer. Je voudrais revenir maintenant au ministre Abdessalam Ould Mohamed Saleh de la Mauritanie, si vous permettez. Nous savons qu'il y a une grande collaboration sur le plan international qui est déjà en cours. Est-ce que vous pouvez évoquer pour nous la stratégie de votre État pour garantir la viabilité à long terme de cette initiative ? Quels sont les avantages économiques, au-delà de l'exportation pour votre pays ?

[Abdessalam Ould Mohamed Saleh]
Merci beaucoup. Si je puis tout d'abord remercier les organisateurs et organisatrices, au sein de la Banque mondiale et de la Banque africaine de développement, pour l'organisation de ce panel. L'accès à l'énergie électricité est essentiel pour le développement. De notre côté, nous avons en 2000, lorsque les dirigeants et dirigeantes se sont réunis pour les objectifs de développement du millénaire, ont été évoqués de grands besoins, mais l'énergie ne faisait pas partie. Il n'y avait aucun objectif dans le cadre des objectifs de développement du millénaire et personne ne s'est demandé comment on allait modifier et transformer le secteur agricole sans énergie. Comment ouvrir les possibilités des zones enclavées, des zones isolées sans énergie ? Donc c'est fondamental. En 2022, nous avons adopté une stratégie à long terme pour garantir l'accès pour les Mauritaniens et Mauritaniennes à l'électricité d'ici à 2030. Cette stratégie a trois piliers. Tout d'abord, Un cadre institutionnel. Nous avons adopté une loi qui encourage le secteur privé, l'investissement de la part du secteur privé. Nous avons établi un régulateur, un système qui sépare la production, la transmission et la distribution d'électricité et qui ouvre au secteur privé, notamment, la production et la transmission. Nous avons fixé un objectif d'ici à 2030 de 50 % minimum d'énergie renouvelable étant donné le potentiel énorme en matière éolien et solaire en Mauritanie. La Mauritanie est l'un des rares pays au monde où il y a à la fois au nord-ouest du pays un énorme potentiel solaire et éolien. Vous pouvez produire presque 24 heures par jour de l'énergie renouvelable dans cet environnement. C'est la raison pour laquelle la Mauritanie est l'un des meilleurs endroits au monde pour la production d'hydrogène vert. À long terme, nous promouvons la production d'hydrogène vert. Nous voulons créer un vrai hub pour la création d'énergie bas carbone et de minerais bas carbone, parce que nous produisons en particulier du minerai de fer. Nous avons signé un certain nombre d'accords avec des grandes entreprises dans ce domaine. La transition énergétique s'accélère et on peut constater que de grandes entreprises sont intéressées dans la production de l'hydrogène vert, parce que ce sera peut-être le carburant de l'avenir. L'hydrogène vert, surtout dans notre cas, peut nous aider, en Mauritanie, à produire du minerai de fer vert et donc de l'acier vert. On sait que la production d'acier représente énormément d'émissions de gaz à effet de serre. C'est la raison pour laquelle nous voulons mobiliser l'hydrogène vert dans ce cadre. Nous devrions pouvoir multiplier par cinq les richesses produites par l'exploitation de minerais de fer par rapport à la situation actuelle. La difficulté là-dedans, c'est le coût de l'électricité. Il est très élevé en Mauritanie, très élevé en général. En Afrique, en moyenne, on paye deux fois plus cher l'électricité en Afrique que le prix de production le plus élevé. On paye sept fois plus cher ce qu'un consommateur chinois paierait pour son électricité, ce qui fait que nos secteurs industriels sont totalement désavantagés, ne sont pas compétitifs. Donc il nous faut faire face à cela. Normalement, il ne devrait pas y avoir de subvention parce que c'est un secteur productif, mais je crois qu’il faut accepter que nous serons obligés de fournir un type de subvention ou un autre pour les personnes les plus pauvres et les régions isolées. C'est pourquoi, dans le cadre de la loi que j'ai évoquée, nous avons porté sur les fonds baptismaux un fonds d'électrification qui bénéficiera de dons pour justement soutenir l'accès à l'électricité pour les plus pauvres.

[Nozipho Tshabalala]
Merci, monsieur le Ministre. Effectivement, vous évoquez un secteur très important pour la Mauritanie, avec des implications de compétitivité. Je crois que c'est un sujet très important parce que ça concrétise effectivement ces débats et ça nous donne un éclairage très utile. Merci d'avoir partagé avec nous la possibilité qui s'ouvre à la Mauritanie de devenir un pôle de l'énergie verte, en particulier de l'hydrogène vert. Je me tourne maintenant vers vous, Kevin Kariuki. Parce qu'on a évoqué la création en 2016 d'une initiative d'Énergies pour l'Afrique, un partenariat qui avait pour but de garantir l'accès universel à l'énergie en Afrique. Est-ce que vous pouvez évoquer brièvement, pour nous, les principes sous-jacents à cette nouvelle donne qu'on a évoquée, celle de 2016 ? Et je crois surtout, qu'avons-nous appris grâce à ce processus-là vis-à-vis de la recette nécessaire pour étendre l'accès à l'énergie en Afrique ?

[Kevin Kariuki]
Merci beaucoup. Tout d'abord, je préciserai concernant cette nouvelle donne pour l'énergie en Afrique. Il est très clair que les objectifs étaient élevés, mais comme le président de la Banque africaine de développement l'a dit, il fallait être courageux et audacieux. Et l'objectif général de cette nouvelle donne, c'était d'ici à 2025, de garantir l'accès de l'énergie pour tous et toutes. Nous avons dit 2025 quand tout le monde parlait de 2030, mais ça s'inscrivait dans les aspirations des pays africains à l'époque. Ce qui a permis d'éclairer nos objectifs en matière de de capacité de transmission, de distribution et de production et en matière de connexion au réseau et hors réseau. Ainsi, c'est ce qui a éclairé cette initiative. Nous avions d'autres objectifs, nous savions que nous devions garantir un accès également à des modes de cuisson propres. C'est un thème très important. Et nous avons également des objectifs en matière de perte sur les systèmes. Pour répondre à votre question, à de voir qu'est-ce qui, finalement, est sous-jacent à cette nouvelle donne ? Tout d'abord, nous voulions inspirer de l'espoir vis-à-vis des problèmes énergétiques en Afrique. Deuxièmement, le but de cette nouvelle donne était d'établir des partenariats transformateurs tels que celui que nous sommes en train de créer avec la Banque Mondiale. Nous souhaitions mobiliser des capitaux nationaux et internationaux à un niveau approprié. Enfin, nous voulions renforcer la gouvernance du secteur et les réglementations et également, nous voulions améliorer les prêts bancaires pour les investissements dans l'énergie. Voilà quelles étaient les ambitions de l'époque, en 2016. Ce que nous avons appris depuis, c'est que l'accès à l'énergie nécessite que l'on mette l'accent sur deux choses : les connexions au réseau et les connexions hors réseau. Il faut fournir qui plus est autant d'investissement pour l'un et pour l'autre. C'est essentiel parce qu'on sait qu'il y a un étalement de la population sur le continent et donc il y a quelques régions du continent qui ne pourront jamais être connectées par le biais d'un réseau commercialement viable au réseau. On sait qu'au moins 50 % des nouvelles connexions d'ici à 2030 se feront par le biais de systèmes d'énergies renouvelables distribuées avec des mini-réseaux solaires pour des régions isolées. Nous avons qui plus est appris que le secteur énergétique de l'Afrique s'appuie beaucoup sur le financement du secteur public. Dans ce cas particulier, nous avons constaté que l'Afrique se finance à hauteur de 34 % auprès du secteur public pour ces initiatives en matière d'énergie. C'est le double du reste du monde. Donc il faut vraiment mobiliser le secteur privé au bénéfice des projets énergétiques. Enfin, nous avons constaté qu'il nous faut renforcer nos marchés de l'énergie pour qu'ils soient résilients face aux chocs internationaux, par exemple la COVID-19. Nous avons tous observé la manière dont la COVID a frappé de plein fouet la chaîne d'approvisionnement, ce qui a créé une situation où, et ça ne nous a pas surpris, 30 millions de personnes ont perdu accès à l'électricité parce que c'était devenu trop cher. Donc, en d'autres termes, il nous faut créer de la résilience dans nos systèmes énergétiques.

[Nozipho Tshabalala]
Merci beaucoup. Des solutions au réseau et hors réseau qui doivent bénéficier des mêmes investissements. Il faut mobiliser plus de financements privés par rapport aux financements publics. Effectivement, 34 % des investissements viennent du secteur public, vous l'avez évoqué. Il faut plus de résilience. Il nous reste encore un peu de temps. J'aimerais, à cette occasion, vous donner l'occasion de répondre à une deuxième série de questions et j'espère que nous pourrons le faire dans les temps. Monsieur Abebe Aemro Selassie, si je puis me tourner à nouveau vers vous. Nous avons évoqué les chocs macroéconomiques. Monsieur Kevin Kariuki a utilisé l'exemple de la Covid. C'est un choc qui a frappé de plein fouet les marchés de l'énergie. Parlons de la dette. En particulier, on sait que des hauts niveaux de dettes rendent très difficile la mobilisation d'investissement dans les infrastructures d'énergie. Comment est-ce le FMI peut aider les États à faire face à ces contraintes macro, en particulier concernant le Fonds fiduciaire pour la résilience ?

[Abebe Aemro Selassie]
Un mot sur la dette, nos pays ont subi un mélange, je dirais un cocktail explosif de chocs. Le prix de la dette a augmenté. Mais n'oublions pas la résilience qui a eu lieu. Les pays qui devaient se restructurer se sont restructurés, mais il y a tout de même beaucoup de résilience dans la région et nous voyons des améliorations dans les conditions de financement également. Donc nous espérons que les pays vont de l'avant. Dans une période telle que celle-ci, quand les pays sont frappés de plein fouet par le choc, les institutions financières, les banques multilatérales de développement doivent intervenir pour compenser justement l'assèchement des financements qui frappent les pays. Donc il nous faut le faire par nos instruments réguliers. Nous avons eu de la chance, parce que les pays qui avaient des bilans plus solides ont été d'accord pour reflécher certains de leur droits de tirages spéciaux au profit du renforcement de la résilience des pays face au choc des pays, grâce aux droits de tirage spéciaux. Et grâce à ces ressources financières supplémentaires, les pays ont pu, à hauteur de 34 ou 35 milliards de dollars, renforcer leur résilience. 18 pays en ont bénéficié. Dans notre région, 11 pays africains non bénéficiés. Ce que nous faisons, c'est que nous nous rendons dans ces pays. Nous essayons de comprendre s'il y a déjà des rapports concernant le changement climatique qui ont été rédigés par la Banque mondiale sur ce pays. Ensuite, sur cette base, nous étudions les politiques d'adaptation au climat et nous mettons en place un financement à l'avenant en appui de ces réformes. Nous sommes très fiers de cette initiative et nous travaillons beaucoup avec ces pays à l'heure actuelle. [Nozipho Tshabalala]
Oui, monsieur Abebe Aemro Selassie, 18 pays ont bénéficié. Vous l'avez dit, vous avez évoqué les travaux très enthousiasmants qui ont lieu à l'heure actuelle. On parle effectivement d'échelle. Il faut que le nombre de ce pays augmente et c'est le cas. Monsieur le Ministre Mohammed Amin Adam, si je puis vous demander une réaction en deux minutes. Ma question est la suivante : je crois qu'il nous faut absolument évoquer l'amélioration exceptionnelle que nous avons faite au Ghana en matière d'accès à l'énergie. Au début des années 2000, l'accès à l'énergie était à hauteur de 30 % pour la population et désormais, ce chiffre est de 87 %. L'objectif étant d'arriver, de manière très déterminée, à 100 %. J'ai une question très simple : est-ce que vous auriez un enseignement à tirer et à partager sur la manière dont on peut rapidement faire progresser l'accès à l'énergie et un enseignement peut-être sur ce qu'il ne faut pas faire dans ce cadre ?

[Mohammed Amin Adam]
Merci beaucoup. Il faut être déterminé en la matière. Dans les années 90, l'État ghanéen a décidé que nous devions tous et toutes avoir accès à l'électricité. Nous avons mis en place les bonnes politiques, des programmes d'électrification ruraux, urbains. Nous avons également mis en place des dispositifs où le coût de l'électricité était partagé entre les territoires et l'État central. Nous sommes à 88,5 % désormais d'accès à l'électricité. Le reste, ce sont des communautés sur des îles ou des communautés isolées qui doivent pouvoir bénéficier de mini-réseaux pour permettre justement un accès universel à l'électricité. En vertu des normes de ce secteur, l'accès universel est typiquement à 90 %, donc nous voulons y parvenir dans quelques années. Alors, qu'est-ce qu'on doit faire, justement ? Oui. Qu’est-ce qu'on ne doit pas faire, en l'occurrence ? Alors, par le passé, nous fournissions l'énergie par le biais de projets non sollicités. Et maintenant, les coûts baissent et on peut acquérir plus de capacités par le biais d'un achat public, d'une commande publique compétitive. Et donc, nous sommes passés de tarifs obligatoires à un système d'achat public et d'appel d'offres, parce que c'est plus cher quand vous ne passez pas par un appel d'offres. Quand vous êtes dans des périodes de crise, On ne peut pas acquérir autant de capacités de production, parce que les investisseurs ne viennent pas vous voir aussi facilement, parce que vous êtes en situation de crise, il y a plus de risques. Et au bout du compte, vous finissez par acquérir des capacités à un coût très élevé. Et il faut assumer ce coût élevé pour toute la vie du contrat que vous signez. Donc comprenons cela, planifions à long terme pour se procurer des capacités et commençons à construire également des lignes de transmission et de distribution pour garantir que tout votre pays aura accès.

[Nozipho Tshabalala]
Je crois que nous avons eu trois conseils pour le prix d'un. Vous avez partagé tous les enseignements d'un coup. Merci. Effectivement, ce qu'il faut faire, c'est aussi important que ce qu'il ne faut pas faire. Si je puis me tourner vers vous maintenant, Ernesto Max Elia Tonela. Nous avons entendu à la fin de cette conversation qu'il est important de mettre l'action sur le réseau et le hors-réseau dans le même temps. Qu'est-ce que le Mozambique a fait, pour améliorer le hors-réseau ? Et comment comptez-vous inciter plus le secteur privé à investir dans le secteur hors-réseau ? Une réponse en deux minutes, s'il vous plaît, monsieur.

[Ernesto Max Elia Tonela]
Le nombre de nouvelles connexions ayant découlé de l'initiative est passé de 150 000 à 400 000 nouvelles connexions par an. Le taux d'électrification a été multiplié par deux par rapport à l'évolution démographique. C'était deux fois l'évolution démographique en zone rurale. Cependant, nous savons qu'il nous faut encore continuer de travailler pour améliorer les cadres institutionnels et réglementaires. Et dans ce cadre, notre gouvernement, l'année dernière, a promulgué une nouvelle loi sur l'électricité qui prend également en compte les évolutions technologiques les plus récentes, y compris les incitations à mettre en place au bénéfice du secteur privé concernant les systèmes résidentiels pour les ménages. L'idée est également de fournir des concessions pour des petits systèmes hors réseau, parce qu'il y avait un vide réglementaire à cet égard. On ne pouvait pas permettre au secteur privé d'aller au-delà dans ses investissements, au-delà du réseau, d'aller sur le hors-réseau.

[Nozipho Tshabalala]
Merci, Monsieur le Ministre. C'est passionnant de voir ce qui a été réalisé et ce qui a permis une augmentation du nombre de personnes connectées au réseau ou hors-réseau. C'est intéressant de voir comment on peut le faire à l'échelle. Monsieur Abdessalam Ould Mohamed Saleh, si j'ai puis me tourner vers vous pour une dernière prise de parole. Nous avons d'ores et déjà évoqué le contexte en Mauritanie et la stratégie de votre gouvernement pour l'accès universel. Est-ce qu'en deux minutes, Vous pouvez évoquer pour nous ce que vous comptez faire pour devenir justement ce pôle régional en matière d'énergie propre totalement intégrée et comment est-ce que vous, le cas échéant, collaborez avec les autres pays de la région ?

[Abdessalam Ould Mohamed Saleh]
Merci beaucoup. Je crois que chaque pays doit se poser cette question. Peut-être l'Afrique en tant que continent doit aussi se poser cette question. Je la pose, cette question. Nous avons des pays qui bénéficient de grandes réserves de gaz. Notre problème numéro un, encore une fois, c'est comment réduire le coût de l'électricité. La meilleure manière de le faire, c'est de produire de l'électricité grâce au gaz et grâce aux sources renouvelables. Malheureusement, tous les pays n'ont pas cette opportunité qui s'offre à eux. Cependant, l'interconnexion énergétique peut résoudre ce problème. Ainsi, c'est une grande question : est-ce que l'Afrique devrait continuer d'exporter tout son gaz ou devrait-elle en garder une partie sur le continent ? Parce que beaucoup d'autres pays veulent probablement acheter de l'électricité à l'Afrique en Afrique. Aujourd'hui, la Mauritanie est connectée au Sénégal grâce à un grand projet que nous mettons en œuvre sous l'égide de la Banque africaine de développement. C'est une des lignes hautes de tension les plus longues d'Afrique qui va aller de l'Ouest jusqu'à l'Est de la Mauritanie pour opérer une interconnexion avec le Mali. Nous agissons d'ores et déjà pour connecter notre pays à d'autres pays de l'Afrique et nous nous préparons pour la prochaine étape, qui sera de produire de l'électricité grâce au gaz et d'injecter de grands volumes d'énergie renouvelable dans le cadre de la production de gaz.

[Nozipho Tshabalala]
Merci, Monsieur le Ministre. Encore une fois, vous évoquez une question importante qui nous faut appréhender. Et vous avez évoqué certes l'expérience mauritanienne. Vous avez ouvert le débat sur la fenêtre africaine. Dernière question à vous, Kevin Kariuki. La Banque africaine de développement a financé le renforcement des réseaux électriques dans des pays comme la République démocratique du Congo, le Burkina Faso. Mais il y a des pays qui sont aux prises avec des conflits, la violence et ainsi de suite. Quel rôle les banques multilatérales peuvent-elles jouer pour s'assurer que ces pays ne sont pas laissés à la traîne en ce qui concerne l'accès à l'énergie sur le continent ?

[Kevin Kariuki]
Merci beaucoup. La meilleure chose à faire, en plus de se concentrer sur les pays fragiles, c'est de se concentrer sur ce que nous devons faire absolument pour accroître la connectivité des réseaux énergétiques. Je vais commencer par dire que 50 % des nouvelles connexions d'ici 2030 porteront sur les énergies renouvelables. Il s'agit de tirer parti des coûts qui chutent de l'énergie solaire et de l'énergie éolienne. Il faut aussi accroître la viabilité des petits réseaux. Mais il y a des contraintes qu'il convient de noter. Premièrement, le coût de mise en œuvre de ce type de projet. Nous estimons qu'il faut environ 25 milliards de dollars par an pour assurer l'accès universel d'ici 2030. Évidemment, les fonds publics sont limités. Il faut compléter cela par le financement du secteur privé. La réalité est celle-ci. L’Afrique ne représente que 2 % des investissements dans les énergies renouvelables à l'échelle mondiale. Cela représente environ 6 milliards de dollars seulement sur un marché de 25 milliards. Et deuxièmement, la plupart des réseaux ne sont pas viables du point de vue commercial. Il y a le facteur coût. Et même si les 2 % sont disponibles, cela représente un montant exorbitant à cause des risques qui sont présents sur le continent. Par ailleurs, il y a les problèmes de faiblesse de la demande et de l'indisponibilité de l'énergie. Il y a des choses qu'on peut faire et qu'on a faites à la Banque africaine de développement. Nous pouvons en faire encore plus en collaboration et en partenariat avec des organisations comme la Banque mondiale. Évidemment, nous travaillons déjà avec l'Alliance mondiale sur l'énergie et la planète. Il faut par ailleurs résoudre la question des cadres réglementaires inadaptées. Quand je vous parle de ces problèmes réglementaires, il y a l'octroi des licences, les normes, il y a l'empiètement sur les réseaux, dans des régions qui ont été laissées de côté pour fournir de l'électricité sans passer par les réseaux. Il faut aussi des financements mixtes pour pouvoir faire participer le secteur privé. On peut aussi faciliter, à travers l'assistance technique, créer des mécanismes qui permettent de faire des études de faisabilité et de mettre en place des plans directeurs. Il y a un environnement qui n'est pas propice et il faut aussi que le de financement soit suffisant pour que les projets soient possibles.

[Nozipho Tshabalala]
Mesdames et messieurs, la conversation a été fantastique. Veuillez applaudir pour ce panel. Cela nous amène à la fin de cette séance. Nous avons beaucoup appris. Nous espérons que cela vous a inspiré et vous pouvez évidemment revoir la vidéo de cette conférence sur le site de la Banque mondiale. Nous aimerions aussi vos commentaires à la suite de ces conférences qui sont diffusées en ligne. Merci.

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