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La santé est un investissement essentiel, qui peut permettre aux pays de générer du capital humain et des dividendes économiques. Mais élargir l'accès et l’offre de soins est un défi qui nécessite volonté politique, moyens financiers et partenariats.

Ce message a été au cœur de notre évènement spécial Passer du défi à l'action, au cours duquel Ajay Banga a annoncé un plan ambitieux visant à aider les pays à fournir des services de santé de qualité et abordables à 1,5 milliard de personnes d’ici 2030.

Au cours d’une conversation informelle animée par la journaliste Shakuntala Santhiran, le président du Groupe de la Banque mondiale et le directeur général de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), Tedros Adhanom Ghebreyesus, ont évoqué les principaux obstacles à l’élargissement de la couverture sanitaire et insisté sur l’urgence d'y remédier.

Ajay Banga a précisé les grandes lignes du plan annoncé par la Banque, qui s'attachera à « élargir le champ » de ses priorités, pour couvrir, au-delà des services de santé maternelle et infantile, les besoins des individus tout au long de leur vie. Une évolution qui répond au vieillissement rapide des populations, à la montée en flèche des maladies non transmissibles, et aux coûts qu’ils engendrent.

L'évènement s'est poursuivi avec une allocution du ministre japonais des Finances, Shun’ichi Suzuki, qui a annoncé à cette occasion la création d’un pôle de connaissances sur la couverture santé universelle. Conçue pour renforcer les capacités des ministères de la santé et des finances, cette initiative bénéficie du soutien de la Banque mondiale et de l’OMS.

Comment bâtir des systèmes de santé résilients, étendre la couverture des soins et améliorer la santé des populations afin que les pays puissent prospérer ? C’est sur ces questions que se sont penchés les deux panels réunissant hauts responsables nationaux et leaders de la société civile. Au centre des discussions : l’importance de la volonté politique, de l'accessibilité financière des soins, de l'adhésion des pays, des partenariats avec le secteur privé et la nécessité d’accroître les financements pour parvenir à une couverture santé pour tous.

Suivre la conversation en ligne #WBGMeetings

Mot de bienvenue (5 minutes)

Conversation informelle / Éclairages et perspectives (20 minutes)

Avec le président du Groupe de la Banque mondiale, Ajay Banga, et le directeur général de l’Organisation mondiale de la santé, Tedros Adhanom Ghebreyesus.

Allocution / Stratégies et initiatives nationales (23 minutes)

Une réflexion sur les priorités en matière de soins de santé universels et les efforts de renforcement des capacités avec Shun’ichi Suzuki, ministre des Finances du Japon.

1er panel / Parvenir à la couverture sanitaire universelle : opportunités et défis (20 minutes)

Muhammad Pate, Sri Mulyani Indrawati et Senait Fisseha partagent leurs points de vue et leurs expériences respectives au Nigéria, en Indonésie et au sein de la Fondation Susan Thompson Buffett.

2e panel / Comment mieux financer la santé ? (20 minutes)

Explorez de nouvelles approches en matière de financement de la santé avec Mohamed Maait, ministre égyptien des Finances, et Lamia Tazi et Joanne Carter, respectivement dirigeante du secteur privé et de la société civile.

[Shakuntala Santhiran]

Bonjour et bienvenue à ces réunions de printemps de 2024 du FMI et de la Banque mondiale. Je m’appelle Shak et on va essayer de discuter de la façon dont les pays peuvent accélérer leur progrès vers une couverture universelle pour tous, où chacun aurait accès à des soins de santé abordables en cas de besoin. N’hésitez pas à publier sur les réseaux sociaux en utilisant notre mot-dièse WBGMeetings. On fera de notre mieux pour répondre à vos questions en ligne. N’hésitez pas à les poser dans la boîte de dialogue si vous nous rejoignez en ligne ou en utilisant le code QR que vous avez sur le dossier des chaises devant vous, pour ceux qui sont sur place ici avec nous. Nous allons ensuite donner la parole au ministre de la Santé et des Finances, aux dirigeants, aux chefs d’entreprises, à la société civile, aux philanthropes et bien d’autres pour discuter de ces questions. Pour commencer, nous allons inviter des spécialistes qui s’y connaissent très bien et qui vont pouvoir nous parler de ce qu’il convient de faire pour accélérer les efforts et les progrès. Nous accueillons d’abord Ajay Banga, président du groupe de la Banque Mondiale, mais également Tedros Adhanom Ghebreyesus, sous-directeur général de l’OMS. Merci de nous rejoindre ici, Ajay. Pour commencer vous avez énormément travaillé sur les mécanismes, les rouages de la Banque mondiale. Pourquoi ?

 

[Ajay Banga]

On m’a posé cette question à plusieurs reprises. Je pense que si la banque travaille mieux, plus rapidement, plus efficacement, alors on peut viser des ambitions plus élevées, parce que l’on fonctionne mieux et on a des capacités supérieures. On peut parler de la métaphore des rouages ou de la plomberie, parce que pour que la maison tienne debout et fonctionne bien, il faut que ses tuyauteries fonctionnent bien également. Nous voulons réduire les délais et réduire les difficultés administratives, vu la complexité de ce sur quoi nous travaillons. Nous avons différentes composantes : le MIGA, la SFI. Et ce qu’on veut, c’est décloisonner le travail de toutes ces entités. Nous avons travaillé sur la vision de la banque. Nous avons essayé de faire évoluer tout cela, mettre en place des partenariats avec des banques multilatérales. Nous travaillons sur le lancement d’une plateforme numérique qui nous permettra de travailler tous ensemble sur le cofinancement d’accords. On travaille aussi sur la normalisation, la passation des marchés. C’est tous les rouages qui permettent à l’organisation de fonctionner plus rapidement et plus efficacement.

 

[Shakuntala Santhiran]

On cherche à rationaliser, c’est bien ça, alors ? Ici, on travaille avec des pays du monde entier sur un grand nombre de questions. Pourquoi les soins de santé aujourd’hui ?

 

[Ajay Banga]

Parce que je pense que c’est la base. En fin de compte, la population a parfois du mal payer les coûts des soins de santé ou a du mal à accéder à ces soins de santé. Et c’est catastrophique. Il y a du travail qui est fait sur le retard de croissance des enfants. C’est important de veiller sur la santé infantile parce que c’est dans les 100 premiers jours que tout se décide. Cette période a un impact sur l’âge adulte et sur les rendements économiques de ces personnes. Pareil pour le changement climatique. Tedros nous en parlera, il pourra nous en parler des heures. Une grande part de la population mondiale n’a pas accès aux soins de santé ou doit payer ces soins à leur charge. Ce qu’il nous faut, c’est travailler sur les fondements de la vie humaine et mettre les soins de santé à la portée de la population. Ça n’a rien de facile, mais le ministre des Finances japonais va nous en parler. Il s’y connaît, il sait comment ça fonctionne.

 

[Shakuntala Santhiran]

La santé et la prospérité sont étroitement liées. On vous a bien compris, Monsieur. Monsieur Ghebreyesus, quelle est votre position sur la couverture de santé universelle ? Vous en êtes le chantre à l’échelle mondiale. Je vous remercie.

 

[Tedros Adhanom Ghebreyesus]

Je remercie Ajay, qui m’a invité à cette réunion de la plus haute importance. Je suis tout à fait d’accord avec ce qu’il a dit : la santé, c’est la base, et la santé, c’est la prospérité, comme vous l’avez dit également. La Banque mondiale prend cette question très au sérieux et nous nous en réjouissons véritablement. Nous avons un partenariat qui progresse depuis longtemps. On travaille sur la couverture santé universelle, sur la préparation à des catastrophes. On travaille également sur un groupe de travail qui fait collaborer les finances et la santé. Alors, merci Ajay. Pour ce qui est de la couverture universelle de santé, 140 pays reconnaissent qu’il s’agit que la santé est un droit fondamental et l’ont inscrit dans leur Constitution. C’est fondamental parce que c’est un choix politique qui peut nous permettre d’assurer la suite au niveau financier et autres. L’OMS a été fondée il y a 76 ans et depuis lors, l’espérance de vie est passée de 46 à 74 ans en moyenne. Un progrès considérable. Les conditions de vie se sont améliorées, la médecine s’est améliorée, la santé publique, et tout cela démontre, témoigne d’un développement général et d’un progrès général. Si l’on se penche sur les ODD, nous ne sommes pas sur la bonne voie pour les atteindre dans les délais. Il y a de grands obstacles qui peuvent nous empêcher de les atteindre. Il nous faut donc redoubler d’efforts, d’où notre partenariat avec la Banque mondiale, avec l’ensemble du système des Nations Unies, les pays qui sont au cœur de nos travaux pour accélérer le travail vers les objectifs.

 

[Shakuntala Santhiran]

Ajay, quels sont les principaux obstacles, Tedros, pardon, à la couverture universelle ?

 

[Tedros Adhanom Ghebreyesus]

Il y a deux types d’obstacles. D’abord, des obstacles à la couverture universelle et ensuite des obstacles financiers. On a donc l’accès dans un premier temps. Les problèmes d’accès peuvent être liés au coût prohibitif ou au manque de moyens. Et ça peut être une cause de pauvreté. On peut faire basculer la population dans la pauvreté. Donc, on a la couverture d’un côté et de l’autre côté, les difficultés financières. Voilà les deux obstacles vers la réalisation de la couverture universelle. Mais on peut également citer d’autres problèmes qu’il nous faut aborder, comme par exemple la pénurie de soignants.

 

[Shakuntala Santhiran]

Et la liste est encore longue. On a aussi le vieillissement de la population, n’est-ce pas ?

 

[Tedros Adhanom Ghebreyesus]

Tout à fait. L’urbanisation, la pandémie, les changements climatiques. La crise climatique, c’est une crise sanitaire. Toutes ces tendances, tous ces problèmes compliquent encore la progression.

 

[Shakuntala Santhiran]

Face à ces défis, Ajay, que fait la Banque pour aider les pays ?

 

[Ajay Banga]

Je voudrais ajouter quelque chose sur la pénurie des soignants. C’est aussi une opportunité, une occasion à saisir. Tedros vient d’Éthiopie. Et sur le continent, le nombre de jeunes qui vont chercher un emploi dans les dix prochaines années, ils ont besoin de développer leurs compétences pour fournir les services dans le domaine de la finance qui vont être nécessaires ces prochaines années. Donc, c’est important pour l’avenir des jeunes. Pour revenir à votre question, on travaille dans 100 pays depuis longtemps sur la santé maternelle et infantile. Si on veut inclure les adolescents et les personnes âgées dans ces efforts, on peut citer les arrêts cardiaques, le diabète, la tension artérielle. Il s’agit de problèmes qui concernent ces tranches d’âge également. Et si on veut une couverture santé universelle, il faut inclure ces autres tranches d’âge. On en est à 1,5 milliard de personnes qu’il faudrait inclure dans ces efforts, et ce à l’horizon 2030. Il faut qu’ils aient véritablement accès aux soins de santé. Il faut que tous puissent avoir accès à des rendez-vous médicaux. Nous devons travailler sur des maladies non transmissibles, étendre l’accès de la population à la santé au sein des différents pays, mais également peut-être vers d’autres pays.

 

[Shakuntala Santhiran]

Vous parlez donc de 1,5 milliard de personnes en l’espace de cinq ans ? [Ajay Banga] Six ans. Je compte cette année.

 

[Shakuntala Santhiran]

Alors, comment est-ce qu’on va faire ?

 

[Ajay Banga]

Ce sera beaucoup de travail. On aura besoin de financements, de connaissances, de partenariats pour y parvenir. Évidemment, des financements. C’est ce qui nous vient tout de suite à l’esprit. L’argent est là, les connaissances sont là, mais ce ne sera jamais suffisant. L’idée, c’est d’investir 50 % de plus. Et pour ça, il faut des fonds de la part du secteur public, du secteur privé. Dans les pays de l’IDA, il y a 21 dollars qui sont consacrés aux soins de santé par an en moyenne. Et ça, ça ne permettra pas de mettre des soignants dans les zones les plus reculées, de les pousser à y travailler. Non, ce qu’il faudra, il faudra plus de financement pour y arriver. Mais dans les pays à revenu intermédiaire, il y a plus de moyens, mais il n’y a pas nécessairement les réglementations nécessaires pour démultiplier les moyens. Et là, on peut travailler en créant, en mettant en place des mesures d’incitation, des politiques, des plateformes. Tedros pourrait nous parler de politique. Et si on fait participer le secteur privé, on peut essayer de travailler davantage sur la fabrication d’équipements médicaux, sur l’ajout de vitamines dans les aliments transformés pour améliorer l’état de santé général. Voilà quelques exemples de mesures qui peuvent fonctionner selon les pays, plus ou moins, et qui peuvent permettre d’améliorer, de faire augmenter le niveau de développement. Passons aux connaissances maintenant. Il faut se demander ce dont a besoin chaque pays. Est-ce que ce sont des compétences ? Est-ce que c’est les coûts qui sont un obstacle ? Est-ce que tel ou tel pays a besoin que la couverture sanitaire soit plus étendue géographiquement ? Il faut bien comprendre les besoins de chaque pays. Tedros est là avec nous et lui, c’est un vrai expert. C’est un puissant fond de connaissance. Nous, ce que nous proposons, c’est une diversification ou des connaissances diversifiées. On s’y connaît en eau, en agriculture et ainsi de suite. Et on comprend également le lien de tous ces domaines avec le domaine de Tedros. On parle ici de santé, mais pas seulement, aussi de finances. Et on lui permet à lui de bien comprendre le carrefour entre ces différents domaines et les difficultés qui se combinent. Voilà une réponse très longue. Il faudra travailler dur d’ici à 2030. Nous commettrons probablement des erreurs en cours de route, mais nous sommes bien décidés à y arriver.

 

[Shakuntala Santhiran]

C’est donc partenariat, financement et mettre en commun, partager les connaissances. Tout cela est essentiel. Docteur Tedros, qu’attendez-vous en matière de soins de santé d’ici six ans ?

 

[Tedros Adhanom Ghebreyesus]

Six ans, oui. En fait, deux choses sont très importantes, si nous voulons avancer, d’abord un engagement politique, et bien sûr, un engagement financier. L’engagement politique : 140 pays qui reconnaissent que la santé est un droit humain fondamental. 140 pays qui reconnaissent la santé comme un droit. Nous espérons que les autres pays suivront cet exemple, parce que la santé est un choix politique et le reste suit, y compris la finance. Deuxièmement, nous avons l’engagement financier. Pour ce qui est de l’engagement financier, là, il y a une façon de résoudre les problèmes. Il y a beaucoup de ministres des Finances ici. Nous voulons accroître les dépenses publiques en santé pour arriver à une santé pour tous. C’est difficile, mais possible. Un exemple auquel je pense, c’est le Royaume-Uni. Après la Deuxième Guerre mondiale, quand l’économie était détruite, Lord Beveridge a lancé le modèle immédiatement après la Deuxième Guerre mondiale, c’est-à-dire le modèle de la couverture sanitaire universelle. Donc, ce qui est essentiel, c’est l’engagement politique et l’engagement financier. Ensuite, et comme je l’ai déjà dit, pour ajouter des années à votre espérance de vie, il vous faut vous concentrer en particulier sur la santé maternelle et infantile, réduire la mortalité maternelle et infantile. Ajay peut en parler. Quand j’étais ministre de la Santé en Éthiopie, en trois ans, nous avons pu réduire la mortalité des mères et des enfants de moins de cinq ans. C’est ce que nous voulons atteindre en 5 ou 6 ans, surtout dans les pays qui ont des chiffres élevés de mortalité maternelle et infantile. Et nous le faisons en faisant la promotion de la santé maternelle, en attaquant les causes fondamentales comme l’alimentation, la pollution de l’air. Il faut commencer par là. Ensuite, il y a la question de l’accès. La couverture sanitaire universelle est fondée sur la santé. Les soins de santé primaires sont le point de départ essentiel. Et à partir de là, nous pouvons prévenir des foyers de maladies. Et d’après ma propre expérience en Éthiopie, la Banque mondiale a été un véritable leader en élaboration de systèmes de santé primaire. Bien sûr, la préparation aux pandémies est réellement importante. Nous investissons déjà là-dedans ainsi que dans la science, les sciences, les différentes données, la technologie. Et tout cela est centré sur les pays. Que faisons-nous au niveau du pays ? Quelles capacités renforçons-nous dans les pays ? Voilà ce qui est crucial. Et au bout du compte, ce sont les pays qui sont les propriétaires, qui se rapproprient des systèmes de santé. Je ne peux pas dire, je ne peux pas assurer que nous allons atteindre tous les résultats, mais les pays doivent et peuvent s’approprier de cette tendance. Et c’est ainsi que nous espérons pouvoir inverser les tendances négatives dans la santé et j’ai l’espoir que nous y arriverons.

 

[Shakuntala Santhiran]

Un appel fort à l’action. Docteur Tedros, Ajay, merci de mettre en relief les défis que nous devons affronter et aussi les opportunités que nous pouvons exploiter quand les personnes ont accès à des soins de santé abordables. Merci à vous deux. Merci à nouveau. Et maintenant, le Japon est un leader en matière de couverture sanitaire universelle. Nous avons l’honneur de recevoir Monsieur Suzuki, le ministre des Finances du Japon. [Applaudissements]

 

[Shun’ichi Suzuki]

En tout premier lieu, je voudrais remercier le président Banga et le Directeur général, Monsieur Tedros, d’une discussion profonde et pleine de visions. C’est un grand honneur pour moi que de vous présenter une brève déclaration sur les efforts du Japon pour promouvoir la couverture sanitaire universelle. Depuis longtemps, le Japon insiste sur l’importance cruciale de cette couverture universelle comme fondement du développement du capital humain et de la croissance durable. Le Japon a également plaidé pour une collaboration financière et en matière de santé qui est essentielle pour arriver à la couverture universelle. C’est la raison pour laquelle le Japon a accueilli la première réunion conjointe des ministres des Finances et des Santés dans le cadre du G20 en 2019, c’est-à-dire au sommet d’Osaka. Dans ce contexte, j’ai le plaisir aujourd’hui de retrouver de nombreuses parties prenantes, y compris des experts en matière de finances et de santé, pour parler de la couverture sanitaire universelle du Japon, collaborer de façon étroite avec la Banque mondiale et l’OMS pour appuyer les pays en développement afin de pouvoir réaliser la couverture sanitaire universelle, y compris par des contributions financières à l’assistance technique dans ce domaine. Afin d’accélérer encore davantage nos efforts, j’ai le plaisir de pouvoir annoncer aujourd’hui que le Japon ainsi que la Banque et l’OMS vont établir un centre de connaissances sur la couverture sanitaire universelle, UHC Knowledge Hub, et cela au Japon en 2025. Le centre appuiera la mise en commun de connaissances sur la couverture sanitaire universelle ainsi que sur le renforcement des capacités des autorités financières et sanitaires et permettra de mettre à profit l’expérience de la Banque et de l’OMS ainsi que l’expérience du Japon. À la Banque, la discussion sur l’IDA-21 est en cours. L’IDA joue un rôle crucial pour intégrer la couverture universelle dans les pays à faibles revenus. Il est impératif de les aider à réunir les ressources financières adéquates pour un système de soins de santé qui fonctionne bien. Le Japon s’attend à ce que l’IDA-21 maintienne la couverture universelle comme une de ses priorités de politique. Aujourd’hui, j’espère que nous aurons un débat très vif sur les défis et les efforts de politique pour établir la couverture universelle dans chaque pays. Sur base de la discussion d’aujourd’hui, le Japon continuera à déployer ses efforts pour promouvoir la couverture sanitaire universelle dans le monde. Merci.

 

[Shakuntala Santhiran]

Merci beaucoup, Monsieur le Ministre Suzuki. Ce message est tellement important, ainsi que l’engagement constant du Japon envers la santé au niveau mondial. J’ai trois questions pour vous, pour le public qui est présent et en ligne, pour connaître la portée, la dimension des défis que nous affrontons. La première question, c’est une réalité triste que les femmes dans les pays à faibles revenus ont plus de probabilités de mourir dans le cadre d’un accouchement que dans les pays à revenus élevés ? Quatre fois, 14 fois, ou 34 fois. Quel est le pourcentage de pays qui ont moins d’un médecin sur 1 000 personnes ? 3 %, 18 %, 33 %, ou 43 %. Et notre troisième et dernière question : que pensez-vous être l’élément le plus important pour pouvoir obtenir une couverture universelle en matière de santé ? Il y a des défis, mais aussi des opportunités. Il faudra des réformes dans les pays. Nous donnons la bienvenue à son Excellence, Monsieur Muhammad Pate, ministre de la Santé du Nigeria, au ministre des Finances de l’Indonésie, et au docteur Senait, vice-président des programmes mondiaux de la Fondation Susan Thompson. Vous êtes les bienvenus. Merci d’avoir pris le temps de nous rejoindre. Muhammad, nous allons commencer par la première question qui vous est adressée. Vous menez des réformes majeures dans votre pays. Quel est votre projet et comment va changer le système de santé au Nigeria pour donner accès à la population à des soins de santé abordables ?

 

[Muhammad Ali Pate]

Nous sommes un pays dont la population est relativement jeune et nombreuse. Et ce que nous cherchons à améliorer est le traitement des maladies non transmissibles et les facteurs de mortalité infantile. Pour ce faire, on essaye d’améliorer la qualité des soins de santé et l’accès aux soins de santé primaires. On essaye de faire en sorte que ces soins soient fonctionnels et qu’ils puissent toucher des milliers de personnes supplémentaires. On a formé des soignants. On cherche également à faire baisser les coûts pour rendre ces soins plus accessibles, abordables. On cherche à améliorer, par la même, la santé maternelle et endiguer les épidémies que l’on connaît. Voilà le projet, voilà nos objectifs pour améliorer l’accès aux Nigérians, aux soins de santé au fil du temps. On va travailler avec nos partenaires au niveau de différents échelons, au niveau des États, au niveau central, pour nous assurer que nos efforts convergent. Et au fil du temps, on espère que l’espérance de vie va s’améliorer, que la mortalité maternelle et infantile va reculer, que les maladies qui peuvent être prévenues le seront davantage. Ces réformes nous permettront de sauver des vies, de réduire les souffrances, d’améliorer l’état de santé, et ce, pour tous les Nigérians, sans laisser personne pour compte. Voilà l’objectif. [Shakuntala Santhiran] C’est ça votre objectif, c’est ça votre projet ? Alors, comment est-ce qu’il se déroule ? Comment est-ce que vous procédez à la mise en œuvre et au maintien de ces réformes ?

 

[Muhammad Ali Pate]

Ça a été un grand travail. Nous remercions le président, parce que comme le disait Tedros, il s’agit d’un projet qui repose sur une volonté politique. Les gouverneurs unissent leurs efforts, les différents secteurs se joignent à nous également. C’est un effort collectif. Les pharmaciens, les médecins, les infirmières cherchent également à contribuer à ces efforts pour étendre, pour avoir un plus grand nombre de soignants dans le pays. Il a été question de 1,5 milliard et c’est là un engagement qui nous réjouit de la part de la Banque au Nigeria. On pourrait se satisfaire de ressources inférieures à cela. Ce serait déjà suffisant, ce serait un bon départ pour nous. Il faut également travailler sur le front non seulement technique, mais sur les autres fronts aussi. C’est vraiment une tâche écrasante, mais Il faut se relever les manches et se mettre au travail.

 

[Shakuntala Santhiran]

Les problèmes de santé représentent une charge pour les familles, pour les ménages. Et pourquoi est-ce qu’un ministre des Finances devrait s’en préoccuper ?

 

[Sri Mulyani Indrawati]

Je pense qu’au ministère de la Finance, la qualité du capital humain est centrale. Parce qu’en fin de compte, si l’économie, si le pays dispose d’un capital humain qui est en meilleure santé, la croissance pourrait en bénéficier. Dans un pays comme l’Indonésie, où il y a une forte population jeune, une démographie très jeune comme au Nigeria, il nous faut agir dès le plus jeune âge. Voilà pourquoi nous avons consacré des ressources conséquentes à cette tranche d’âge. Nous avons l’obligation de garantir un accès universel aux soins de santé. C’est cher, certes, mais le retour sur investissement est là, est au rendez-vous. Dans notre pays, il y a une assurance maladie. La principale assurance maladie en Indonésie reçoit un soutien budgétaire de notre État parce que les familles les plus pauvres peuvent bénéficier gratuitement de ce régime d’assurance. Ils n’ont pas besoin de payer les soins de leur poche. Le problème se trouve plutôt du côté de la demande, d’où l’importance de réforme du côté de l’offre. L’Indonésie est un grand pays. Nous avons plus de 200 millions d’habitants et la santé relève des compétences des États. Ils sont décentralisés et donc la qualité des services varie à travers le pays, d’où l’importance de soutien d’un point de vue des capacités techniques, des soignants. C’est essentiel. Nous avons lancé une vaste réforme du secteur de la santé pour aller dans ce sens. On est soutenu par des banques multilatérales. Voilà pourquoi nous participons également à cette réunion.

 

[Shakuntala Santhiran]

L’Indonésie a réussi à mobiliser des fonds de financement pour ces réformes. Comment est-ce que vous vous y êtes pris ?

 

[Sri Mulyani Indrawati]

Alors, les banques de développement multilatérales étaient intéressées par un pays où vous voulez que les pays prennent en main ces programmes. Dans notre pays, les ministères de la Santé, des Finances étaient intéressés. Ils ont adopté ce type de réformes concernant le système de santé. Elles portent sur la formation des médecins, la gestion des hôpitaux dans les États, les soins de santé primaires, le lien avec les assurances, les régimes d’assurance. Tout ceci est englobé dans une même réforme qui cherche non seulement à guérir, mais aussi à prévenir. Ils essayent de partir de la prévention pour couvrir aussi le dépistage, et puis les traitements en hôpital. Il faut s’assurer également que la population améliore ses habitudes de vie. Nous nous sommes donc approprié ce projet. Nous avons fait preuve de leadership et ces qualités facilitent l’obtention de la confiance de la part des différentes organisations comme les banques de développement ou le FMI. Le système de passation des marchés doit également être clair et les processus doivent être facilités. C’est des améliorations sur lesquelles nous travaillons. On essaye d’améliorer le fonctionnement de notre système de passation de marché. C’est également une question de crédibilité. Nous avons adopté des réformes, nous menons des efforts de mise en œuvre. On travaille aussi sur le front du financement.

 

[Shakuntala Santhiran]

Senait, vous travaillez depuis bien longtemps dans le domaine de la santé. Vous êtes vous-même médecin. S’agissant des droits génésiques, comment pensez-vous que l’on pourrait utiliser à meilleur escient, à meilleur profit les ressources disponibles ?

 

[Senait Fisseha]

Bonjour, je pense que ça ne surprendra personne, du moins ici. À travers le monde, on voit que les programmes sont surtout verticaux. La meilleure façon d’utiliser à meilleur escient les ressources, c’est de se reposer sur des systèmes de soins de santé primaires plutôt que de travailler verticalement sur des maladies isolées. Prenons l’exemple d’une patiente qui cherche des soins. Elle doit s’adresser à une clinique en particulier pour le VIH, à une autre pour les soins de maternité. Au lieu de fonctionner de cette façon, il faudrait investir dans le renforcement du système de santé dans son ensemble et travailler sur la prestation des services de santé. Nous sommes engagés à améliorer l’état de santé des femmes et des filles. Mais en renforçant le système de santé publique dans son ensemble, on a constaté qu’on pouvait toucher un plus grand nombre de femmes et que les services pouvaient être étendus, intensifiés. À l’échelle mondiale, ce n’est pas toujours possible, mais il y a des exemples desquels on peut s’inspirer. Si on se concentre, par exemple, sur la main-d’œuvre, les travailleurs, il faut s’assurer que les services soient disponibles. Et ça, c’est aussi utile pour se préparer à une pandémie. Ensuite, si on regarde les catastrophes naturelles, les soignants sont aussi en première ligne. Or, souvent, ce sont des femmes qui sont en première ligne, qui sont soignantes en première ligne. En leur permettant d’évoluer professionnellement, on travaille également sur l’égalité des genres. Il y a vraiment énormément que l’on peut faire pour maximiser nos ressources en travaillant dans une démarche globale plutôt qu’en nous concentrant sur des maladies de façons isolées.

 

[Shakuntala Santhiran]

Vous avez évoqué beaucoup de perspectives, celles du secteur privé, public. Vous-même, vous êtes médecin, vous avez exercé dans les services d’urgence. Qu’est-ce que vous espérez voir changer d’ici à l’année prochaine dans les débats ?

 

[Muhammad Ali Pate]

D’abord, s’agissant de la couverture universelle de santé, avant la pandémie, on était très loin de la situation dans laquelle on est aujourd’hui. La pandémie, malheureusement ou heureusement, nous a permis d’accomplir beaucoup de projets. Si on maintient le même rythme, on pourrait continuer à progresser. Maintenant, il y a quelques adaptations que l’on peut faire pour accélérer les progrès. D’abord, travailler de façon plus centralisée à l’échelle des pays, travailler avec des partenaires à l’échelle mondiale pour obtenir plus de soutien, d’assistance technique, de financement et puis nous reposer sur des systèmes nationaux qui soient viables et transparents. Si ces changements sont mis en œuvre et s’il y a une possibilité d’obtenir des financements à l’échelle mondiale, on pourrait voir changer les choses. Il faut penser aux femmes enceintes, aux enfants. Ils ont besoin de centres de santé primaires. Ils ont besoin de pouvoir être examinés. Ils ont besoin que les moyens soient disponibles à proximité. Notre président a l’initiative qui cherche précisément à faire converger toutes les personnes vers un même système qui utiliserait moins de ressources et qui permette d’obtenir plus de résultats et des résultats en particulier pour les plus vulnérables. Nous espérons que ce sera l’évolution que l’on observera dès l’année prochaine. Je m’adresse ici à mes collègues de la Banque, à d’autres partenaires qui nous aident à aller dans ce sens. Si la Banque tient ses promesses, nous nous suivrons et c’est vers là que nous tendrons.

 

[Shakuntala Santhiran]

Merci Muhammad. Pour terminer, qu’est-ce qui suscite l’espérance en vous ?

 

[Senait Fisseha]

Oui, nous vivons une époque très fragile. Il est facile de perdre espoir. Néanmoins, il y a beaucoup de raisons d’avoir de l’espoir, surtout après la pandémie. Les choses ont tellement changé que nous ne pouvons pas retourner en arrière. Les leaders du sud du monde inspirent l’espoir. Le leadership que je vois dans les institutions internationales, comme Tedros qui parle de soins de santé pour des millions de personnes. Ou Juan Pablo, qui a été ministre de la Santé de la Colombie et qui nous dit également que le monde que nous avons toujours connu a beaucoup changé, et il faut réunir l’appui de tous les leaders. Quatre-vingts années de développement ont apporté trop peu de progrès. Nous avons avancé, mais quand on examine les dépenses, elles devraient être plus importantes. Il y a encore de vieux modèles coloniaux qui ne répondent plus aux besoins actuels, quand je vois ce que le ministre Pate fait au Nigeria. Récemment, je me suis réunie avec le président Ruto pour pouvoir aussi tripler et quadrupler, comme au Rwanda, le nombre de soignants. Il faudrait trop d’années pour pouvoir pour atteindre les objectifs. Il nous faut donc, pour accélérer le changement et la dynamique, investir d’une telle sorte que les gouvernements puissent s’approprier de tout cela. La Banque participe, mais le processus est en fait sous le contrôle des pays. Quand je regarde vers mon propre continent, il faut une nouvelle voie, une nouvelle façon de négocier. Nous voyons ce qui s’est passé pendant la pandémie. J’ai l’espoir que le monde entier s’est réveillé, a pris conscience de la nouvelle réalité. Nous devons réellement nous approcher le plus possible de la couverture universelle.

 

[Shakuntala Santhiran]

Merci beaucoup. Merci d’être là avec nous pour montrer comment le changement est possible grâce au leadership. Et les ministres des Finances et de la Santé doivent collaborer parce que sinon, de bons soins de santé ne seront pas possibles. Merci à tous. Avant d’inviter les membres du panel suivant, nous allons écouter les voix de quelques soignants qui sont à l’avant-garde des soins de santé.

 

[Dr Chidinma S. Ononogbu]

Et une des meilleures innovations qui nous a aidés avec la santé, c’est d’avoir des services d’ambulance à temps.

 

[Dr Longtila M. Sangtam]

Une autre intervention qui nous a véritablement aidés, c’est l’installation de lumières solaires.

 

[Dr Eustaquio Solis]

Cette télémédecine et son programme ont contribué au soin complet pour les patients.

 

[Dr Nii Ayikwei A. Addo-Quaye]

Et une des grandes innovations qui a pu nous aider a été la gestion des systèmes de santé électronique pour mieux pouvoir contacter les patients.

 

[Shakuntala Santhiran]

Tellement important d’entendre la voix de ces héros locaux pour savoir comment faire arriver les soins de santé aux personnes en besoin. Les réponses au questionnaire qui soulignent le besoin d’étendre les soins de santé, 34 fois plus de possibilités de mourir en accouchement pour les femmes dans les pays à faibles revenus. Il faudra donc investir davantage dans la santé. Maintenant, nous souhaitons la bienvenue au docteur Mohamed Maait, ministre des Finances de l’Égypte. Madame Lamia Tazi, Lamia est directrice de Sothema, une industrie pharmaceutique du Maroc, et Madame Joanne Carter, de l’organisation Results pour réduire la pauvreté. Merci de nous accompagner. Ajay vient d’annoncer un nouvel engagement du groupe de la Banque Mondiale pour aider les pays à faire parvenir les soins de santé à 1,5 milliard de personnes en six ans. Joanne, vous dirigez un service de santé. Que penser des priorités en matière de financement ?

 

[Joanne Carter]

Une chose dont je voudrais parler : je ne suis pas sûre que nous avons assez fêté l’objectif, parce que cela veut dire que nous allons doubler l’engagement. Il faut l’applaudir. Donc, tout d’abord, il faut des objectifs ambitieux, mais par conséquent, il faut aussi un financement ambitieux. Et bien sûr, tout commence par des budgets nationaux et les défendeurs de la cause dans le monde entier, y compris les parlementaires, visent à augmenter les investissements, surtout pour les populations les plus marginalisées. Mais il faut aussi davantage de financements concessionnels pour les pays qui souffrent un fort fardeau de la dette. Gavi, le Fonds mondial, l’OMS, la facilité mondiale de crédit sont tous essentiels. Et autre chose que je voudrais ajouter : que les objectifs, les cibles doivent nous orienter, mais par expérience, nous savons que les objectifs les plus ambitieux peuvent parfois cacher des inégalités. Nous devons donc cibler les groupes les plus vulnérables. Pour atteindre l’objectif, il faut de l’égalité à l’intérieur des pays et d’un pays à l’autre. Le dernier panel en a parlé, mais il faut se concentrer sur l’investissement en santé primaire, surtout pour les groupes les plus marginalisés. Cela doit être un des premiers objectifs. Et pour mentionner l’impact de l’IDA, il faut penser au nombre de personnes touchées par les soins de santé et en particulier les quintiles les plus bas. La sécurité sanitaire mondiale est importante, mais il est aussi important de savoir comment la formuler. Parce que la préparation au niveau mondial n’est pas suffisante s’il n’y a pas d’engagement au niveau communautaire. Il nous faut aussi accompagner cela de l’investissement dans le capital social. Donc, commencer par les soins primaires et ensuite, assurer, entre autres, l’appui alimentaire pour impliquer les investissements dans les différents secteurs. Si on ne garantit pas l’égalité, les ambitions des pays ne vont pas pouvoir être réalisées. Et cela inclut bien sûr les bailleurs de fonds.

 

[Shakuntala Santhiran]

Merci Joanne. Nous avons répété souvent le besoin d’un engagement politique. Ministre Maait, que faites-vous pour que tous les Égyptiens aient accès aux soins de santé ?

 

[Mohamed Maait]

Je crois que nous avons été un des premiers pays, en 1962, à introduire une assurance santé pour la population. Mais à l’époque, le système n’incluait pas toute la population et était devenu financièrement non viable. Il y a quatre ans, nous avons décidé de changer et d’introduire une assurance santé universelle selon un modèle et une formule différente. Nous avons dû tenir compte de la capacité du ministère de la Santé de fournir des finances, mais cela dépend de son budget, bien sûr. C’est pour cela que nous avons réuni toutes les ressources nécessaires pour assurer que le système serait financièrement pérenne. Ensuite, pour assurer cela, nous avons voulu inclure toutes les familles. Et troisièmement, mettre les secteurs publics et privés en concurrence, en compétition, pour que tous les citoyens puissent recevoir un service et créer aussi une organisation qui serait l’organisation de régulation. Donc, trois organisations : l’achat, le fournisseur et le régulateur. Petit à petit, nous avons pu remplacer le vieux système par un nouveau. Nous avons d’abord les codes payés par les employeurs à l’assurance santé, ensuite des ressources fiscales, et finalement l’État qui paiera la contribution pour ceux qui sont incapables de s’acquitter du paiement. Ainsi, nous pouvons assurer que le système soit durable. Nous avons créé un mécanisme pour rassurer que l’établissement des prix des services de santé soit attractif à la fois pour le secteur privé et le secteur public, pour que tous soient en concurrence pour le bénéfice des citoyens. Nous continuons à développer le système. La Banque mondiale, la JICA et nous-mêmes mesurons le niveau de satisfaction de la population avec le système de santé.

 

[Shakuntala Santhiran]

Donc, vous dites que les systèmes privé et public doivent se concurrencer, mais pas seulement pour ce qui est des prix ?

 

[Mohamed Maait]

Oui, surtout en fonction de la satisfaction, pour pouvoir choisir le fournisseur public ou privé. Deuxièmement, ils ne doivent pas être concurrents sur le coût principal des services, mais en matière de qualité de services, parce que nous avons également un comité indépendant qui inclut le secteur public, privé et le troisième, l’indépendant. Notre slogan est que l’argent doit suivre le patient. Si un patient choisit un fournisseur en particulier, l’argent doit suivre. Ce n’est pas le gouvernement qui fournit les services, mais qui les acquiert. Tout cela pour que le citoyen puisse chercher et trouver des services de qualité satisfaisante. J’ai aussi été ministre des Finances adjoint avant de devenir ministre de la Santé. D’abord, comme ministre de la Santé adjoint, j’ai reçu un certificat de santé. Mais comme ministre, j’ai compris que le financement dépend d’un budget, lui aussi en bonne santé. Nous avons pu établir une excellente réserve financière pour créer ce système.

 

[Shakuntala Santhiran]

Merci. Passons maintenant à madame Lamia Tazi. Lamia, vous êtes active dans le secteur privé. Selon votre expérience, comment les secteurs public et privé peuvent-ils se compléter dans le développement d’un vaccin ? Vous avez besoin d’un tel partenariat public-privé ?

 

[Lamia Tazi]

Oui, merci Shak. Merci de m’inviter. Je voudrais parler de la contribution du secteur pharmaceutique dans la couverture de santé. Comme vous le dites, je suis dirigeante d’entreprise au Maroc. En 2021, Sa Majesté le roi du Maroc, a décidé d’accorder une couverture santé à tous les habitants. Une décision très courageuse, sachant que cela représentait une quantité considérable d’habitants à couvrir. J’ai été ravie de participer à ce projet qui correspond bien au titre de cet événement, parce qu’il s’agissait de passer du défi à l’action. Plusieurs années après le lancement de cette initiative, elle a été couronnée de succès qui aurait été impossible sans la collaboration des secteurs privé et public. Au Maroc, nous avons eu la chance de pouvoir nous reposer sur un secteur pharmaceutique déjà solide grâce à des mesures d’incitation qui étaient accordées par le ministère de la Santé. On a décidé d’encourager la fabrication locale et donc en 2021, 70 % des besoins en médicament étaient approvisionnés à l’échelle locale. Sachant que les dépenses de santé proviennent en grande partie de l’achat de médicaments, c’était important de pouvoir compter sur des fabricants locaux, garantissant la disponibilité des médicaments et un accès équitable pour tous les Marocains. Donc, la collaboration, c’est essentiel. La production locale, par ailleurs, rend le produit plus accessible en termes de quantité, mais aussi de diversité des médicaments, parce que nous produisons peut-être des molécules qui n’existent pas ailleurs et cette production locale nous a permis de pouvoir utiliser ce genre de molécules. On a également parlé de vaccins ici. Ma société pharmaceutique a eu la chance de se joindre à la grande aventure, entre guillemets, de la COVID. À cette occasion,on a participé à un partenariat public-privé. J’ai conduit les premiers essais cliniques des vaccins au Maroc et ensuite, on est passé à la fabrication des vaccins. Tout ceci a été rendu possible par une collaboration très étroite entre l’industrie pharmaceutique, mon entreprise et le ministère de la Santé.

 

[Shakuntala Santhiran]

Penchons-nous à présent sur les avantages de la production locale. Monsieur le Ministre, que fait l’Égypte ? Est-ce que le gouvernement travaille avec le secteur privé ?

 

[Mohamed Maait]

J’ai insisté beaucoup au moment de la conception de ce système sur le fait que nous devions travailler avec le secteur privé pour atteindre nos objectifs. Dans certains gouvernements, il n’y a pas les infrastructures de base qui sont nécessaires et nous avons donc dû commencer par travailler sur les infrastructures. Comment attirer le secteur privé, le convaincre de se joindre à nous ? Premièrement, il faut lui permettre de contribuer à l’établissement des prix. Il faut leur donner la possibilité à tout moment, de participer aux communautés qui fixent les prix, que ce soit toutes les semaines, tous les mois. Il faut discuter tous ensemble pour que le secteur privé ait le sentiment que le système contribue également à leur prospérité pour qu’ils se rendent compte que leurs affaires peuvent profiter de ces initiatives. Premièrement, donc. Et deuxièmement, il faut que leurs capacités, leurs places dans le système. Ils doivent travailler sur la question du prix, de la fourniture, de l’approvisionnement, mais aussi... Et cela leur permet d’avoir un chiffre d’affaires plus élevé encore. Dans certaines régions de l’Égypte, le secteur privé a plus de capacités et plus d’infrastructures que dans d’autres. Donc, si les prix sont bien fixés, s’ils ont suffisamment de travail, un chiffre d’affaires nécessaire, suffisant, alors ils auront envie de travailler avec nous et de signer régulièrement des contrats avec le gouvernement. Même chose pour les régimes d’assurances, les compagnies d’assurances. On leur a proposé de travailler avec nous et pour les convaincre, on leur a dit que, dans certaines régions, en fonction de la démographie, ils pourront bénéficier du marché. On a mis en place un barème des tarifs qui s’appliquaient à tous. On a laissé les régimes, les compagnies d’assurance signer des contrats avec des employeurs et ils travaillaient de leur côté. Ça les satisfaisait. Nous aussi, nous étions satisfaits. Et tout ce qui importe ici, en fin de compte, c’est la satisfaction de la population qui doit avoir accès à un système qui fonctionne. Nous, au gouvernement, ce qui nous importe, c’est que le système soit pérenne, qu’il réponde aux besoins de la population, peu importe, indépendamment, de qui fournit le service. Ce qui nous importe, c’est que la population soit satisfaite. Nous, on fournit, on met l’argent sur la table. Mais ces financements ne peuvent pas seulement provenir du budget de l’État. Ils doivent également provenir des cotisations sociales des travailleurs, des employeurs. Autres ressources : les impôts. En fin de compte, le ministère de la Santé doit lui aussi financer ce système, en partie notamment, au nom, à la place des personnes qui n’ont pas les moyens de cotiser.

 

[Shakuntala Santhiran]

Merci Monsieur. Revenons à la production locale. On a tiré des enseignements de la pandémie de COVID-19 dans un grand nombre de pays. On s’est rendu compte que les équipements médicaux, les médicaments n’étaient pas produits localement et n’étaient pas disponibles. Vous, au Maroc, vous produisez localement, vous produisez aussi au Sénégal, vous envisagez de vous étendre à d’autres pays d’Afrique et du Moyen-Orient. En quoi la production locale a permis d’étendre la couverture ?

 

[Lamia Tazi]

Nous savons tous que la pandémie de COVID nous a tous mis à l’épreuve et a mis en particulier à l’épreuve le système de santé. Même dans les pays riches qui ont été confrontés à des pénuries de médicaments et d’équipements médicaux. Le Maroc avait la chance de pouvoir se reposer sur une production locale. On a pu fournir tous les médicaments nécessaires alors que d’autres produits importants n’étaient plus disponibles. On a également approvisionné d’autres pays africains, des partenaires, qui subissaient par ailleurs des pénuries de nombreux produits. Sans cette production locale au Maroc et en Afrique, on aurait été confronté à un plus grand nombre de problèmes. Je vais parler d’opportunités, des avantages que représente l’industrie pharmaceutique pour la couverture universelle. Cette industrie permet de réaliser des économies d’échelle, de faire baisser les prix, de produire une quantité supérieure, de rendre les produits plus accessibles. C’est l’importance du coût des médicaments et des soins pour la couverture santé. En fin de compte, tout ceci contribue à la mise en place d’un à l’environnement propice et à convaincre les acteurs d’investir davantage dans notre région. Les soins de santé primaires, c’est très important, mais on a également besoin de soins spécialisés et de molécules qui sont très chères pour des pays comme le nôtre. En oncologie, par exemple. Donc, il faut encourager les investissements dans les nouvelles technologies pour émettre un écosystème de recherche et de développement qui n’existe pas à l’heure actuelle dans notre pays. Comme vous l’avez dit, les partenariats entre le secteur public et privé permettent à tous de sortir gagnants. Et moi-même, je suis ravie de participer à cette aventure, comme je l’ai dit. On réfléchit, comme je vous l’ai dit, à étendre notre activité au-delà du Maroc, au-delà de la région. Donc vraiment, tout le monde en ressort gagnant.

 

[Shakuntala Santhiran]

Merci Lamia. Pour conclure, Joanne, vous défendez la couverture de santé universelle depuis le début de votre carrière. Et la plus grande maladie, le plus grand des maux, c’est la pauvreté. Alors, comment pensez-vous que nous puissions présenter le financement de la santé comme la priorité absolue ?

 

[Joanne Carter]

J’en reviens toujours à la même chose. On ne peut pas atteindre nos objectifs en matière de couverture universelle, de soins de santé primaires sans établir cette priorité, la priorité du financement. Ce sont les pays qui sont en position la plus difficile, qui doivent nous orienter sur ces efforts. Les donateurs ont aussi leur rôle à jouer dans le financement. Les dons, les prêts, les financements concessionnels doivent être revus à la hausse. C’est vraiment essentiel pour encourager les investissements nationaux et les ambitions. Ici, à la Banque, il y a un instrument qui peut aider les pays à mobiliser davantage de ressources à l’échelle nationale et internationale. Très important également, quand les pays veulent augmenter leurs investissements dans la santé et la nutrition, cela doit inciter les donateurs à en faire davantage. Ça ne doit pas être un prétexte qu’ils invoquent pour en faire moins. Vous avez parlé de la production locale. Tout le monde doit mettre sa pierre à l’édifice pour la couverture universelle. L’IDA travaille avec différents secteurs, et notamment les secteurs de la santé, pour y parvenir. Vous nous posez la question de ce qu’il faut faire pour y parvenir. On a besoin de travailler avec les ministères de la Santé, de la Finance. On a besoin de travailler avec les fabricants, on a besoin de travailler avec les Parlements. Il y en a quelques-uns qui sont représentés ici. Et puis aussi avec les dirigeants locaux, la société civile, les collectivités qui sont directement concernés parce qu’il faut garantir la responsabilisation et la mobilisation de ressources. Et puis, pour conclure, je travaille depuis des dizaines d’années avec les États-Unis et d’autres pays donateurs, et je sais que dans ces pays, on peut trouver des partenariats solides, des partenaires solides, qui défendent aussi la question de la santé. Les décisions ne sont pas toutes de nature économiques. Elles sont aussi politiques. On a donc besoin d’obtenir le soutien de nos partenaires. Et on ne peut pas laisser faire quand on voit que les partenaires se désengagent sur la question de la santé et de la couverture de santé universelle, parce que ce sont les plus vulnérables qui en paient le prix. Monsieur Tedros l’a dit : c’est une décision politique. On ne peut pas laisser faire quand on voit qu’il y a de moins en moins de ressources et qu’il faut en faire davantage. L’IDA et d’autres organisations internationales peuvent nous aider à faire en sorte que les pays en fassent plus, que les différents acteurs en fassent plus.

 

[Shakuntala Santhiran]

Merci, merci d’avoir participé à cette conversation. C’est vrai, les partenariats sont essentiels pour faire progresser la situation. Il faut travailler avec la société civile, on le sait, les gouvernements qui doivent donner la priorité à la santé, mais aussi avec le secteur privé qui peut combler certaines lacunes, notamment en matière de prestation des soins de santé et de production de produits médicaux. Merci à ceux qui ont répondu à notre quiz. Quel est l’élément le plus important pour accélérer la progression vers la couverture santé universelle ? Vous voyez ici les réponses. Celles qui apparaissent en plus gros sont celles qui ont été les plus récurrentes. On a le financement, l’argent, la volonté politique. Il y a beaucoup de synonymes ici : financement, argent. Il s’agit d’un investissement qui profite à tout un chacun. On a aussi le capital humain et le progrès. Merci à tous les participants. Merci d’avoir partagé vos réflexions. On en arrive au terme de cette conversation. Vous pourrez la regarder à nouveau en ligne où elle sera disponible. N’hésitez pas à utiliser notre mot-dièse WBGMeetings. Merci. [Musique]

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