[Rajini Vaidyanathan] Bonjour à tous. Bienvenue aux réunions annuelles de 2024 du FMI et de la Banque Mondiale. Bienvenue à tous. Je suis Rajini. Pendant les 90 minutes à venir, on va essayer de répondre à une question : comment l'alimentation et l'agroalimentaire peuvent-ils être un moteur de croissance durable et de création d'emplois ? On va examiner le grand potentiel du système alimentaire mondial pour voir comment le secteur peut encourager la croissance économique et créer les emplois de demain, tout en prenant en charge les défis climatiques. Vous pouvez vous joindre à la conversation en ligne, vous pouvez utiliser le hashtag WBGMeetings. On répondra à vos questions en ligne en plusieurs langues à live.worldbank.org. Si vous regardez en ligne, vous pouvez soumettre vos questions dans le chat. Si vous êtes ici avec nous, vous pouvez utiliser le QR code qui est affiché un peu partout dans la salle. Durant l'événement, on va écouter des chefs d'entreprises, des organisations agricoles et des ministres des quatre coins de la planète concernés par cet agenda. Avant cela, nous allons écouter le président du Groupe de la Banque Mondiale, Ajay Banga, sur le sujet.
[Ajay Banga] Merci beaucoup. C'est un plaisir d'être ici avec vous. Pendant des décennies, nous avons parlé du potentiel de l'agro-industrie et du rôle que joue l'agriculture dans la vie de tous les jours pour façonner l'avenir de la sécurité alimentaire, de la nutrition, de la croissance et de l'emploi. Nous avons examiné les défis sous tous les angles : comment augmenter la production alimentaire, stimuler la productivité, résoudre les problèmes liés à la pénurie de l'eau, les engrais, les infrastructures et bien évidemment le financement. Ces défis ont souvent été des obstacles à la réalisation du plein potentiel de cette industrie. Mais aujourd'hui, quelque chose a changé, quelque chose est différent. Quatre changements clés se dessinent, qui font que le moment, d'après moi, est propice à une nouvelle approche stratégique pour le groupe de la Banque mondiale. Tout d'abord, l'agriculture est de plus en plus vulnérable au risque climatique et contribue de manière significative aux émissions alors qu’elle ne reçoit que 4 % du financement climatique mondial. Il est donc clairement possible de puiser dans ces ressources pour faire progresser l'agriculture intelligente face au climat, ce qui permettrait d'accroître la productivité tout en réduisant les émissions. Deuxièmement, de nouveaux outils de dérisquage ouvrent la voie à l'afflux de capitaux privés dans les pays en développement et le secteur agricole. Nous avons vu des garanties de crédit, des facilités de première perte et des instruments d'assurance contribuer à rendre les prêts sûrs et plus viables sur le plan commercial pour le secteur privé. Ces outils financiers, lorsqu'ils sont associés à une politique du secteur public et des réformes réglementaires, peuvent créer un environnement propice aux investisseurs privés. Troisièmement, dans le passé, il était difficile d'atteindre les agriculteurs individuels. Même pour les FinTech ou les banques commerciales, c'était difficile. Les progrès de la numérisation et les nouveaux outils numériques ont créé des opportunités pour regrouper les agriculteurs et les mettre en relation avec des acquéreurs, des services financiers et des technologies innovantes qui améliorent la productivité. J'en ai fait l'expérience réelle lors de ma carrière précédente. En outre, ces outils créent une empreinte numérique, aident les agriculteurs à établir des antécédents de crédit et à réduire considérablement le coût de la prestation de services financiers, parfois jusqu'à 90 % de moins que ce que ça aurait été s'ils n'avaient pas eu ces instruments. Quatrièmement, une partie importante du financement de l'agro-industrie provient de grandes entreprises alimentaires et de négociants qui opèrent souvent de manière isolée. Ceci crée des inefficiences, des inefficacités, de la fragmentation et laisse de côté les petits agriculteurs qui sont exclus de ces avantages. Toutefois, nous avons constaté qu'avec les associations d'agriculteurs et les organisations de producteurs, nous pouvons surmonter les difficultés du passé. Ces quatre changements émergents ont le potentiel de remodeler fondamentalement le paysage de l'agro-industrie. Ils interviennent à un moment où des opportunités extraordinaires se présentent, car la demande alimentaire mondiale devrait augmenter de 50 à 60 % au cours des prochaines décennies. Tirer parti de ces opportunités ne se fera pas sans une nouvelle approche. Et pour nous, ce changement commence dès aujourd'hui avec l'objectif de créer un écosystème complet pour l'industrie agroalimentaire pour réunir tous les éléments du Groupe de la Banque mondiale pour travailler solidairement. Ce pivot stratégique est rendu possible grâce au travail que nous avons accompli au cours des 16 derniers mois pour devenir une institution meilleure, plus simple et mieux coordonnée. Il nous permet d'aller au-delà des efforts fragmentés et ce que j'appelle des solutions en constellation pour devenir une institution plus efficace, plus simple et plus coordonnée. Avec des petits exploitants agricoles et des organisations de producteurs qui sont au centre, comme la fondation de cette nouvelle manière. Nous associons une nouvelle façon de travailler avec un nouveau niveau d'investissement, en doublant nos engagements en matière d'agrofinance et d'agro-industrie pour atteindre 9 milliards de dollars par an d'ici à 2030. Avec l'expérience de la BIRD et de l'IDA en matière de renforcement des capacités des services du secteur public, avec l'IFC et la MIGA en matière de financement et d'accès au secteur privé, on pense qu'on peut apporter des changements qui seront perçus et ressentis par des entreprises et des partenaires gouvernementaux dans l'objectif de porter la mobilisation du secteur privé à 5 milliards de dollars à l'horizon de 2030. Par exemple, nos services du secteur public peuvent aider les pays à élaborer des réglementations et des normes comme celles qui garantissent que les produits sont conformes aux exigences des marchés d'exportation. Elles peuvent donner des conseils sur les solutions en matière de régimes fonciers ou développer des réseaux nationaux d'irrigation. Dans le domaine du financement de la lutte contre le changement climatique, elles peuvent aider les gouvernements à réaffecter une partie des 1 250 milliards de dollars de subventions aux combustibles fossiles, à l'agriculture et à la pêche afin d'encourager des pratiques plus écologiques, débloquant ainsi une source importante de financement pour le secteur agricole. Quant à nos équipes du secteur privé, elles peuvent se concentrer sur tous les aspects du financement par emprunt et par action à l’atténuation des risques au moyen de garanties. Ces garanties ont toujours été un défi parce que les producteurs n'ont pas toujours été en mesure d'accéder à nos instruments de dérisquage fragmentés. Nous nous dirigeons maintenant vers une approche intégrée en rassemblant ces ressources pour offrir un soutien complet. La plateforme simplifiée de garanties du Groupe de la Banque mondiale est une étape clé de cette transformation, facilitant la fourniture de solutions sur mesure qui répondent aux diverses demandes de nos partenaires. Mais là où nous voyons le plus grand potentiel, c'est en intégrant le lien entre notre travail dans le secteur public et notre soutien au secteur privé pour aider les petits exploitants agricoles à se connecter aux chaînes d'approvisionnement. La BIRD possède l'expertise nécessaire pour travailler en étroite collaboration avec les organisations de petits exploitants et de producteurs afin d'améliorer leur productivité et leur résilience au climat et d'en faire des fournisseurs viables, capables d'atteindre l'échelle, la cohérence et les normes élevées dont les grandes entreprises ont besoin. Une fois établie, l'IFC interviendra non seulement pour financer l'équipement et autres, mais aussi pour mettre en relation ces coopératives, ces organisations de producteurs et d'exploitants avec des entreprises à la recherche de sources de production de qualité fiables. Les principaux goulets d'étranglement à éliminer diffèrent d'un pays à l'autre et d'une chaîne de valeur à l'autre. Nous ne pouvons pas prédéterminer ces interventions de manière universelle. Ce serait une erreur parce que chaque pays a différents obstacles à surmonter. Mais grâce à l'approche écosystémique du Groupe de la Banque mondiale, nous serons en mesure d'identifier et d'éliminer un certain nombre d'obstacles à la création d'opportunités. L'effort de transformation de l'agro-industrie ne vise pas seulement à assurer les systèmes alimentaires de demain. Il s'agit fondamentalement d'une initiative en faveur de l'emploi. Au cours des dix prochaines années, 1,2 milliard de jeunes dans des pays en développement entreront sur le marché du travail. Pourtant, seuls 420 millions d'emplois devraient être alors disponibles dans ces pays, ce qui laisse près de 800 millions d'entre eux sans voie d'accès clair à l'emploi. Un emploi, c'est la dignité. La pauvreté, c'est un état d'esprit et pas seulement un mode d'existence. Il faut aider les jeunes en leur donnant l'espoir nécessaire pour qu'ils fassent une partie importante de la croissance économique et diffuser l'optimisme de par le monde. Nous avons donc deux voies : l'une où cette génération est le moteur de notre avenir, ou l'autre où elle remet en cause notre avenir en raison des migrations, des troubles sociaux et en raison du découragement provoqué par le chômage. Notre changement stratégique dans l'agro-industrie vise à ouvrir la voie à un avenir plus radieux. La possibilité d'emplois ainsi créés et l'amélioration de la qualité de vie et la dignité amenées par ces mêmes emplois. La qualité de vie s'améliore avec l'augmentation de la productivité agricole. Les pratiques de production intelligentes sur le plan climatique permettent de réduire des émissions et d'assainir l'air. Des revenus plus élevés permettent d'investir dans des infrastructures d'eau douce. Les régimes alimentaires s'améliorent, les enfants grandissent en meilleure santé et sont à même de tirer le meilleur parti de leur éducation, et les communautés en meilleure santé sont plus résistantes. Pour les jeunes, l'essor d'une agriculture florissante est la promesse d'une vie meilleure. Avec plus d'emplois dans les zones rurales et des revenus plus élevés, ils ne sont plus confrontés aux mêmes limites que les générations précédentes et leurs parents. Ils ont la possibilité de poursuivre des carrières épanouissantes, que ce soit dans l'agriculture avec leur famille ou dans une nouvelle génération d'emplois qui nécessiterait des compétences et une éducation d'un autre type. Le but, c'est que ça devienne leur choix. Les chances d'un avenir meilleur deviennent plus accessibles, ce qui crée ainsi un cycle de prospérité, de progrès. Nous sommes à la croisée des chemins et la voie que nous choisissons aujourd'hui déterminera l'avenir. En transformant l'agriculture pour les petits exploitants agricoles et en transformant l'agro-industrie en une voie possible pour les petits exploitants, ils développent leurs propres moyens. On peut créer le système alimentaire de demain, élever le niveau de vie encore plus important. On peut créer des emplois et faire naître l'espoir. Merci de votre soutien.
[Rajini Vaidyanathan] Merci beaucoup, Président Banga, pour vos remarques luminaires. Nous allons maintenant ouvrir les panels. On en aura plusieurs cette matinée. J'aimerais d'abord vous présenter nos deux premiers panélistes : Anne Tvinnereim, la ministre du Développement international de Norvège, et Ndidi Okonkwo Nwuneli, présidente de la ONE Campaign. Bienvenue à toutes les deux. On a écouté ce qu'a dit le président Banga, certains des défis. Je vais commencer avec vous, Ndidi. Vous avez créé une entreprise dans le but de créer des aliments nutritifs au Nigeria. Comment équilibrer le désir de profit et de croissance tout en assurant l'accès des gens aux aliments nutritifs, et comme l'a dit le président Banga, en faisant en sorte que les exploitants agricoles soient bien payés ?
[Ndidi Okonkwo Nwuneli] Merci. Pour moi, le point focal important, c'est les PME en Afrique. Et moi, j'ai consacré une grande partie de ma vie à faire ça. C'est toujours le pouvoir de la production locale pour les marchés locaux et les goûts locaux. Ce qu'on a décidé de faire, c'est d'investir dans ce dont ont besoin les Nigérians en nous approvisionnant localement. On a créé une entreprise de farine et de snacks de qualité. On travaille avec 10 000 exploitants agricoles, non seulement pour améliorer leur vie, mais améliorer l'apport nutritionnel des gens. Beaucoup de PME n'ont pas d'environnement habilitant ni la technologie, les connaissances et le soutien nécessaires pour le faire. Mais quand on investit pour porter en avant ces changements, vous débloquez un potentiel énorme. Ce qu'on a montré avec cette entreprise, c'est que les PME peuvent non seulement créer des emplois, 90 % de notre personnel sont des femmes, donc on couvre l'égalité hommes-femmes. Beaucoup du personnel sont des premiers emplois. On leur donne un repas chaud, une assurance maladie et on construit les canaux de distribution avec les femmes. Donc, cet effet catalyseur est énorme. Et ma vision est d'avoir des millions de PME qui vont véritablement pouvoir construire le panorama local. Ça gère la nutrition et les questions de l'endettement. L’Afrique a des aliments nutritifs, les meilleurs aliments du monde, mais on se concentre sur les importations comme solution par opposition à l'enrichissement de la chaîne de valeur locale et à travers les chaînes de valeur africaines qui ont montré leur capacité à monter en puissance. Je suis très enthousiaste, mais au-delà des agriculteurs, il faut investir dans les PME qui transforment les aliments pour les marchés locaux et faire en sorte que ces aliments soient sains, viables, et que leurs sources soient de manière climato-résiliente.
[Rajini Vaidyanathan] Pour ce qui est des PME et des épices et des snacks, ça nous ouvre l'appétit. Maintenant, nous allons avoir la perspective du gouvernement. La Norvège a mis un fort accent sur l'alimentation et la nutrition. C'est au cœur de votre agenda en matière d'aide aux pays en voie de développement aussi. Dites-nous comment vous vous y prenez et pourquoi vous le faites et quels en sont les impacts ?
[Anne Beathe Tvinnereim] Je vais commencer par le pourquoi la Norvège a fait une priorité de la sécurité alimentaire pour beaucoup de raisons. Premièrement, la nourriture est un droit de la personne fondamental. Il y a 50 ans, le monde a promis de mettre fin à la faim. Nous voilà aujourd'hui. C'est disgracieux, c'est une honte. Le deuxième objectif de développement durable était le premier à aller dans la mauvaise direction. Depuis 2014, nous avons vu le nombre de personnes souffrant de la faim croître, puis la pandémie, puis l'invasion de l'Ukraine et tout a accéléré dans la mauvaise direction. C'est donc la première raison. Deuxièmement, la production alimentaire est au cœur de tant de menaces existentielles, tant de défis auxquels nous sommes confrontés. La production agricole fait partie du problème climatique, mais fait également partie de la solution. Nous devons investir dans des processus agricoles qui répondent à la crise climatique, qui s'adaptent. Et je suis sûre qu'investir dans les petites productions agricoles sera un moyen clé d'avancer. Nous savons que 75 % des gens les plus pauvres vivent dans des régions rurales. Et je pense que ce sont les chiffres de la Banque mondiale. Investir dans le secteur agricole dans l'Afrique subsaharienne est 11 % plus efficace que les investissements d'autres régions. Pour moi, c'est évident. Il y a des millions de petits agriculteurs en Afrique qui ne peuvent pas produire assez pour les marchés locaux ou régionaux. En même temps, il y a un continent africain qui va investir 10 milliards dans la nourriture l'année prochaine. Ce sont des possibilités qui ne se réalisent pas. Investir dans les petites opérations agricoles, c'est important, mais il faut également investir dans les chaînes de valeur.
[Rajini Vaidyanathan] Merci Anna. Ndidi, je vais vous demander un commentaire sur ce que disait Anna au sujet du potentiel africain. On parle beaucoup du fait que l'Afrique pourrait devenir le panier de nourriture du monde. Comment ?
[Ndidi Okonkwo Nwuneli] Il faut commencer par l'investissement et l'innovation, les systèmes d'engrais, les systèmes de recherche qui sont créés en Afrique pour l'Afrique. On voit ceci se faire pour le riz, pour le cassava, pour d'autres produits qui nous mènent à des gains de productivité. Nous voyons ceci dans beaucoup de chaînes de valeur. Deuxièmement, le capital qui sert de catalyseur. Les capitaux et ces interventions sont critiques. Nous voulons une croissance poussée par le secteur privé qui ajoute de la valeur et la transformation. Les Africains en ont assez d'être vus comme des producteurs de subsistance. Nous devons agrandir l'échelle et beaucoup d'agriculteurs veulent passer à l'étape où ils deviennent des entrepreneurs agricoles. Troisièmement, le transfert de connaissances et de compétences. Nos jeunes veulent utiliser la technologie. Ils sont très enthousiastes pour pouvoir agrandir les exploitations. Et les données. Nous avons maintenant tant de technologies et tant de données que nous pourrons croître. Quatrièmement, c'est l'accès au marché. On ne parle pas seulement d'éliminer les obstacles inter-Afrique, mais pour pouvoir faire du commerce avec le reste du monde, avec de la nourriture qui a du goût et qui est bonne et saine. Le visage de l'Afrique ne doit plus être un enfant affamé. La face de la pauvreté ne doit pas être une femme africaine. Quand nous pensons à l'Afrique, il faut pouvoir penser à une ou un entrepreneur réussi parce que nous pourrons faire concurrence avec les meilleurs. Et nous commençons à avoir beaucoup de bons efforts. Nous travaillons avec des entrepreneurs qui sont en fait en train d'agrandir leurs exploitations, mais nous devons travailler ensemble. Je suis très contente que la Banque mondiale priorise l'addition de valeur en Afrique parce que c'est critique pour les emplois, pour combler l'écart entre les sexes et pour arriver au virage nécessaire.
[Rajini Vaidyanathan] Oui, merci beaucoup de vos commentaires. Vous avez parlé de l’IDA, qui est l'Association d'aide internationale. La Norvège essaie d'aider de ce côté-là. La Norvège aide à financer l'IDA qui fait partie du Groupe de la Banque mondiale et qui offre du financement aux pays en développement. Comment, d'après vous, l'IDA peut-elle changer les choses ?
[Anne Beathe Tvinnereim] Pour moi, l'IDA est au cœur des solutions pour investir dans la sécurité alimentaire et l'agriculture en Afrique. Nous devons tous nous rallier à cette notion pour nous assurer que le renflouement de l'IDA se fait. Il y a tant de fragmentations dans l'architecture, dans le secteur du développement. Nous devons appuyer ce qui fonctionne. L'IDA fonctionne. En tirant profit de ce que les donateurs investissent, ils multiplient ces investissements. Et je suis tellement heureuse de voir que l'agriculture et la sécurité alimentaire soient une priorité pour ces réunions. C'est évident que l'IDA sera au cœur de la réponse à ces défis et sera également instrumentale pour relever les défis qui se présentent. Nous avons vu comment le Brésil, qui a la présidence du G20 cette année, a augmenté la priorité de la sécurité alimentaire. L’Alliance contre la faim sera lancée le mois prochain. Et je suis très heureuse de voir que l'IDA collabore avec cette alliance mondiale. Nous devons l'appuyer. La meilleure nouvelle, c'est vraiment cette collaboration entre l'IDA et l'Alliance globale contre la faim. Nous ne pouvons pas continuer à créer de nouveaux fonds. Chaque fois que nous voyons un défi, utilisons ce qui fonctionne déjà. Et l'IDA fonctionne.
[Rajini Vaidyanathan] Merci, Madame la Ministre. Il nous reste quelques cinq minutes et je veux poser une question sur des facteurs qui sont sous-jacents à cette situation de façon générale. Je commence avec vous, Madame la Ministre. Comment arriver à la résilience climatique ? Comment atteindre ces objectifs dans un monde qui est en crise climatique ?
[Anne Beathe Tvinnereim] Comme j'ai dit, la production de la nourriture fait partie de la solution, non seulement du problème. Ce que j'aimerais voir, c'est la possibilité de faire le lien entre différents facteurs. Dans quelques semaines, nous allons discuter du défi climatique aux réunions COP. Là aussi, je veux voir que la production de la nourriture soit une priorité à la réunion COP. Nous devons faire des petits producteurs agricoles une priorité. Aujourd'hui, seulement 0,8 % du financement climatique atteint les petites productions agricoles, les petites exploitations. Et c'est absurde parce que ce sont ces producteurs qui sont vraiment à la ligne de front du changement climatique. C'est eux que les donateurs doivent pouvoir joindre. Il faut également pouvoir faire de réels investissements dans ces chaînes de valeur. La Norvège lance un nouveau fonds, le fonds FASA, qui est quelque chose de nouveau, mais c'est assez simple comme principe. Nous lançons un mécanisme de première perte pour nous assurer d'investir dans ces exploitations souvent menées par des femmes qui créent une valeur ajoutée à ce que produisent les petites exploitations. Mais ces femmes sont parfois un investissement trop petit pour les banques privées, mais trop grand pour le microfinancement, donc elles tombent entre les deux. Nous devons donc focaliser notre attention et nos finances sur ce secteur-là et nous ferons une vraie différence.
[Rajini Vaidyanathan] Merci Madame la Ministre. On vous a applaudie quand vous avez dit que la production alimentaire doit être une priorité. Ndidi, comment est-ce qu'on change ce narratif ?
[Ndidi Okonkwo Nwuneli] Oui, il faut une approche d'écosystème pour nous attaquer au changement climatique dans notre contexte. La nourriture est critique. La nourriture est nécessaire pour vivre, est nécessaire pour la culture et est également un facteur crucial pour que nous puissions maintenir notre résilience. Nous voulons premièrement un engagement d'appuyer, de travailler avec les pays africains dans ces crises. Et oui, on peut parler de l'endettement, parce que beaucoup de pays doivent choisir entre payer les frais scolaires ou les soins de santé pour leur population ou rembourser la dette. Donc, nous voulons des partenariats avec des pays africains pour penser à des échanges d'endettement, à des restructurations liées à des salaires, liées à d'autres facteurs. C'est essentiel. Deuxièmement, il faut vraiment une volonté politique au plus haut niveau. Nous avons suivi les fonds climatiques à leur dernière destination et tristement, la plupart de ces dons n'atteignent pas leur objectif ou ne peuvent pas joindre les gens qui en ont vraiment besoin. Donc, il faut travailler au niveau local, nous tenir imputables. Il faut également beaucoup plus de collaborations au niveau mondial. J'applaudis la Norvège pour ce nouveau fonds. Nous devons voir beaucoup de ces échanges, des investissements de capital catalytique. Et je pense que nous pourrons, dans nos vies, voir l'Afrique produire comme elle devrait.
[Rajini Vaidyanathan] Merci à vous, Madame la Ministre. Merci, Ndidi. Ça nous fait vraiment réfléchir et ça nous rappelle à quoi ressemble ce défi sur le terrain en termes réels. Merci beaucoup. Maintenant, nous allons parler à des joueurs principaux du Brésil, de l'Inde et du Sénégal pour entendre ce qu'ils pensent de la nourriture et de la croissance mondiale. Mais avant cela, réfléchissons un peu au potentiel dans ce secteur. Il pourrait y avoir un avantage de 5 à 10 000 milliards si l'agroéconomie produit de la nourriture nutritive. Ici, ils payent bien les agriculteurs. Jusqu'à 80 % des agriculteurs n'ont pas les facteurs qu'il faut. Les personnes qui dirigent le secteur sont marginalisées. Chaque année, les pays consacrent environ 660 milliards de dollars aux subventions agricoles et à d'autres mesures qui dissuadent les producteurs de prendre des décisions durables et rentables. Les banques estiment que si 10 % de ces fonds ont été réaffectés, les bénéfices seraient énormes. Par exemple, cela pourrait contribuer à réduire de 40 % les émissions mondiales de gaz à effet de serre. Pour en parler en plus de détails, souhaitons la bienvenue au prochain panel, Francisco Tiu Laurel Junior, le secrétaire du ministère de l'Agriculture des Philippines, et Vera Esperança Dos Santos Daves De Sousa, ministre des Finances de l’Angola. Merci. Maintenant, la question à laquelle nous allons réfléchir, c'est ce que les gouvernements peuvent faire pour créer un meilleur système. Je vais commencer par vous, Monsieur le Secrétaire. Aux Philippines, vous avez des difficultés à rendre le secteur du riz concurrentiel, donc ça a mené à des crises pour les consommateurs. En fin de compte, maintenant, vous importez moins de riz de l'extérieur. Comment est-ce que ceci a amélioré la vie des agriculteurs ?
[Francisco P. Tiu Laurel, Jr.] L'objectif principal, c'est permettre aux agriculteurs d'améliorer leur récolte pour qu'ils aient plus de revenus, mais ce n'est pas aussi facile que ça. Il faut utiliser beaucoup de technologies, avoir les bonnes semences pour les bonnes saisons. Nous devons nous adapter à de nouvelles techniques agricoles, comme une rotation entre le mouillé et le sec, adopter le calendrier dans certaines régions pour améliorer la récolte. Il a fallu augmenter l'intensité des semences. Il y a toute une série de mesures que nous devons mettre en œuvre pour améliorer les revenus de nos agriculteurs.
[Rajini Vaidyanathan] Est-ce que les agriculteurs ont été ouverts à ce changement comme nous avons entendu plus tôt ?
[Francisco P. Tiu Laurel, Jr.] C'est une question de responsabiliser les agriculteurs sur le terrain. Ils ont été assez positifs si, bien sûr, le gouvernement les appuie. Mais l'appui veut dire un peu de subventions, un peu de financement. Et l'assurance est un élément très important de ce que nous devons faire. Il y a des petites exploitations. Les aider a été un défi, mais si la série de mesures que nous leur offrons est attrayante, ils sont prêts à faire partie d'une coopérative ou d'une association.
[Rajini Vaidyanathan] Merci, Monsieur le Secrétaire. Madame la Ministre, à vous maintenant. En Angola, vous entreprenez une transformation tout aussi ambitieuse. Vous voulez déplacer les investissements du pétrole vers l'agriculture. Comment le faisiez-vous et quels sont les défis auxquels vous êtes confrontés ?
[Vera Daves De Sousa] Merci. Premièrement, il faut un vrai changement de mentalité. Nous devons nous assurer de sensibiliser les gens à l'importance d'une diversification économique et entreprendre d'encourager des industries où les bénéfices n'arrivent pas si rapidement, mais seront bons. Nous voyons maintenant l'intérêt se produire. Il y a un mouvement assez fort maintenant parmi les petites exploitations, mais nous devons continuer à appuyer l'agro-industrie. Il faut une infrastructure, il faut des routes qui permettent de transporter les récoltes de la ferme vers les marchés. Il faut des aires d'entreposage sous de bonnes conditions pour que les produits restent en bon état pour longtemps. Le système financier s'est refait pour accommoder ces nouveaux facteurs et il faut que les banques aient les marges d'investissement nécessaires pour appuyer cette niche. La liquidité du système doit être disponible. Il faut également les connaissances, la science, la productivité, comment augmenter l'échelle de la production. Il faut investir beaucoup d'énergie dans ces variables et c'est ce qui va nous aider à appuyer les familles, les aider à produire plus, les aider à avoir des exploitations rentables, donc de faire de l'argent. C'est ce qui va attirer plus d'exploitations commerciales.
[Rajini Vaidyanathan] Vous disiez que vous voulez attirer des intérêts commerciaux. Il y a des choses que le gouvernement peut faire et des choses que le secteur privé peut faire. Comment naviguez-vous à travers ces défis-là ?
[Vera Daves De Sousa] Nous faisons le nécessaire pour créer les conditions qui sont propices à attirer cet intérêt, à une bonne structure d'imposition des garanties publiques, donner même aux institutions financières la liquidité nécessaire pour que le secteur privé qui veut investir et les lignes de financement leur permettant de participer. Nous voulons également voir comment nous pouvons aider à joindre ceux qui veulent produire avec ceux qui veulent acheter. Parfois, on les réunit pour qu'ils puissent parler et on encourage la création de nouvelles relations.
[Rajini Vaidyanathan] Je voudrais vous amener au même point. Quels partenariats sont au cœur de votre [inintelligible] avec le secteur privé ? Quel est le rôle joué par les institutions financières dans votre pays pour transformer le secteur agricole ?
[Francisco P. Tiu Laurel, Jr.] Pour ce qui est du gouvernement, nous tenons des réunions régulières, mensuelles, bihebdomadaires, avec le secteur privé et autres parties prenantes. Nous prévoyons, en tout cas, nous voulons une fusion des réflexions, des esprits pour que le secteur privé et le gouvernement aient les mêmes objectifs et aboutissent à la même feuille de route pour satisfaire les objectifs de la sécurité alimentaire. Bien évidemment, le secteur privé et les institutions financières sont parties prenantes. Il y a la Banque de Développement des Philippines qui nous aide aussi, à l'instar des banques commerciales et bien évidemment, la Banque mondiale joue un rôle prépondérant et peut beaucoup aider l'agriculture philippine.
[Rajini Vaidyanathan] J'aimerais vous demander à tous deux une question supplémentaire, encore une fois, qui est le fondement de cette conversation. Malheureusement, la seule fois où je suis venue aux Philippines, c'était pour couvrir un typhon, Haiyan, terrible, pour nous rappeler l'impact terrible des changements climatiques. Quel est le rôle de cela au niveau des conversations que vous tenez en tant que gouvernement, aussi au niveau du secteur privé, avec les agriculteurs locaux, pour ce qui est d'aliments sains et nutritifs et l'équilibre l'embrayage avec les changements climatiques ?
[Francisco P. Tiu Laurel, Jr.] C'est un grand défi aux Philippines, ces changements climatiques. On a 23 typhons en moyenne par an. On ressort d'El Niño maintenant. La Niña arrive. C'est vraiment un manque d'infrastructures et de capacité de stockage de l'eau, de céréales, de viande, de légumes, de stockage à froid. Réfrigérer est un problème. Et pour atténuer les changements climatiques, on doit fortement investir dans l'infrastructure et les systèmes logistiques en matière de chaîne alimentaire aux Philippines. Et ça, c'est l'entreposage des vivres qui est très important.
[Rajini Vaidyanathan] Et vous avez les mêmes perspectives en Angola ?
[Vera Daves De Sousa] Oui, mais nous travaillons aussi avec nos partenaires multilatéraux. On a un projet avec la Banque mondiale visant à renforcer la résilience des cultures, des agriculteurs, de toute la chaîne de production pour la rendre plus résiliente aux effets des changements climatiques. Et nous avons d'autres initiatives en vertu desquelles nous faisons de notre mieux pour atténuer les impacts des changements climatiques sur la production agricole, sur les agriculteurs eux-mêmes, avec le soutien de nos partenaires multilatéraux. Et nous allouons un budget qui nous est propre à ces efforts. Évidemment, c'est une question d'infrastructure, mais c'est aussi une question d'irrigation. Il faut étudier les cultures, comment produire et comment nous assurer que les agriculteurs aient les connaissances nécessaires pour gérer cela, les semences, les engrais, le renforcement des capacités de la production, au niveau de la production et aussi faire face au changement climatique.
[Rajini Vaidyanathan] Malheureusement, nous n'avons plus de temps pour ce panel, mais je crois que le public sera d'accord pour dire que ce sont là des informations très intéressantes sur comment on travaille avec le secteur privé, ce qu'on peut faire au niveau du gouvernement et des agriculteurs à l'échelle locale. Merci beaucoup. Rappelez-vous que vous pouvez envoyer des questions sur ce dont nous avons parlé jusqu'à présent. Vous pouvez utiliser le hashtag WBGMeetings. On a des experts qui peuvent vous répondre en plusieurs langues directement, live.worldbank.org. Envoyez aussi vos questions sur le chat en direct et on a un QR code qui est affiché de part et d'autre de cette salle. Ce qui m'amène au volet suivant de cette conversation. On a un panel international, mais pour vous donner une idée de l'importance de cette discussion, l'économie alimentaire emploie 1,2 milliard de personnes de par le monde. L'agriculture est un énorme créateur d'emplois. Par exemple, en Afrique, l'agriculture génère environ 68 % des revenus à l'échelle rurale. Dans beaucoup d'économies en développement, les réseaux informels fournissent 25 % des services financiers qui sont accessibles aux petits exploitants agricoles. Mais il existe des solutions. Par exemple, si les agriculteurs ont accès aux services financiers bancaires, ça pourrait ajouter 500 milliards de dollars de valeur à l'économie mondiale d'ici à 2030. Et c'est évidemment une somme importante. Ici, pour en parler, c’est Mabouba Diagne, ministre de l'Agriculture, de la Souveraineté alimentaire et de l’Élevage du Sénégal. Merci beaucoup. Divyadharshini, présidente du Projet de transformation rurale. Ishmael Sunga, merci de votre présence, PDG de la Confédération des syndicats agricoles d'Afrique australe, et Ayodeji Balogun, PDG d’AFEX au Nigeria. Prenons place. Bienvenue à tous. Je suis sûre que vous avez écouté les discussions précédentes en matière du potentiel de ce secteur, en matière de création d'emplois. Monsieur le Ministre, nous allons commencer avec vous. On a parlé de manière détaillée de cela : comment les capitaux privés peuvent débloquer et fournir la transformation nécessaire de l'économie alimentaire ? Comment cela a fonctionné pour votre pays ?
[Mabouba Diagne] Actuellement, le Sénégal importe près de 1,2 milliard de dollars de denrées alimentaires pour alimenter sa population : 1,4 million de tonnes métriques de riz, 860 tonnes métriques de maïs, des fruits et légumes. Et la chaîne de valeur de ces produits de base pourrait permettre de créer des centaines de milliers d'emplois. Si on peut créer des coopératives dans les 557 communes du pays. 35 types de semences produites. Le stockage, la transformation est liée, le marché national aux marchés régionaux et internationaux. Nous pensons que c'est seulement à travers ces chaînes de valeur qu'on peut créer ces milliers d'emplois. Aujourd'hui, si vous voyez comment l'agriculture et le bétail sont impactés dans notre pays, la technologie peut être utilisée pour sauter les étapes de développement et liées à l'agro-industrie de toute l'Afrique pour parvenir aux marchés internationaux. Je vais vous en donner un exemple. Le Sénégal importe du lait en poudre pour 100 millions d'euros par an. Il nous faut 55 000 vaches, on n'a pas besoin de plus de 20 000 hectares de terre. Imaginez tous les petits emplois qui pourraient être créés. Encore une fois, le bétail, les agriculteurs, la transformation du lait localement. Ce serait des centaines de milliers d'emplois qu'on pourrait créer ainsi. J'ai passé 27 ans à l'étranger au niveau du marché bancaire international. Quand je suis revenu chez moi, c'est exactement ce que j'ai fait. Et en créant six petites entreprises, j'ai créé des centaines d'emplois. Et dans les 12 à 14 mois à venir, on va créer des milliers d'emplois et je suis fermement convaincu que comme ministre de l'Agriculture, c'est ce que j'essaie de répliquer. Je demande au secteur privé, à travers des partenariats publics privés, de soutenir le gouvernement pour le faire ensemble.
[Rajini Vaidyanathan] Merci beaucoup, Monsieur le Ministre. C'est très intéressant cet exemple que vous avez cité, parce qu’encore une fois, il faut comprendre le marché de toutes les perspectives, pas seulement les agriculteurs et leurs besoins, mais le potentiel avec le secteur privé. D'ailleurs, j'aimerais vous demander de rebondir avec la perspective du secteur privé. Votre société, AFEX, a un modèle qui connecte les agriculteurs au marché. Comment ça marche et quels en sont les avantages ?
[Ayodeji Balogun] Merci beaucoup. Quand on regarde les modèles, la première question. [pause] Nous avons d'abord besoin de créer un modèle au moins de 10 000 dollars et quand on aura cela, on pourra créer des talents. C'est la première fois que nos agriculteurs sont éduqués. Ils ont les réseaux sociaux, ils ont un téléphone portable. C'est la première fois. Et on continue à avoir des opérations avec eux comme on le faisait il y a 30 ans. Il faut réfléchir à ça à AFEX. Quand l'agriculteur fait partie du réseau AFEX, il a accès à des services partagés. Il peut avoir accès aux prêts, il peut accéder au marché et il a accès aux produits stockés. Ça peut améliorer la productivité, il peut obtenir les meilleurs prix. C'est comme ça que nous abordons la problématique. L'agriculteur peut commencer à investir, à construire sa maison, et on essaie de voir comment on peut répliquer ce modèle dans d'autres pays.
[Rajini Vaidyanathan] D'après ce que vous dites, c'est toujours une question de modernisation du secteur, de l'actualiser aux réalités d'aujourd'hui. J'aimerais amener Divya à la conversation parce que ce n'est pas seulement une question d'homme. J'ai vécu en Inde, j'ai vu beaucoup de femmes travailler dans les champs. Les femmes jouent un rôle important dans l'agriculture de par le monde et ce n'est pas toujours reconnu, ce travail. Divya, dites-nous, quel est le travail que vous faites pour surmonter certains des obstacles que les femmes agricultrices rencontrent, un faible salaire, moins de visibilité en Inde ?
[S. Divyadharshini] L'agriculture emploie toujours 80 % de la main-d'œuvre féminine, mais nos études montrent que dans tous les pays où la participation de la main-d'œuvre est accrue, ça améliore l'économie locale et l'économie nationale. En Inde, les femmes contribuent en tant que travailleuses agricoles, cultivatrices et les politiques doivent faire en sorte que les femmes participent à l'entrepreneuriat rural agricole. Dans beaucoup de programmes, c’est le cas en Inde, le but, c'est d'autonomiser les femmes, créer beaucoup d'initiatives de moyens d'existence et promouvoir l'entrepreneuriat. Donc, ce qui se passe, c'est qu'on permet aux femmes d'accéder au marché, aux institutions financières formelles et aux financements disponibles dans le secteur. Elles ont accès à la formation pour renforcer les capacités. Mais le but, c'est d'améliorer la mise à l'échelle, de multiplier les opportunités et que l'égalité hommes-femmes soit réelle, que les femmes commencent à être vues comme occupantes des fonctions professionnelles réservées aux femmes, mais en fait, il faut qu'elles puissent avoir accès à d'autres emplois et qu'elles puissent sortir de l'économie rurale pour aussi freiner l'immigration autant que possible.
[Rajini Vaidyanathan] Ishmael, je vais vous inviter à intervenir. Vous connectez les agriculteurs à travers des syndicats agricoles au-delà des frontières. On a parlé de l'autonomisation des femmes, la technologie. Comment ces deux éléments se traduisent dans les travaux que vous réalisez ?
[Ishmael Sunga] Ce sont des choses importantes : la technologie, la politique et l'innovation en général. Ce sont ça les moteurs du changement et ce qui permet d'accélérer ces changements, au lieu de faire les choses à la cadence habituelle. Il est important de connecter les agriculteurs au-delà de leurs frontières parce que ces agriculteurs rencontrent des problèmes similaires. C'est une question d'intensité ou d'échelle qui les différencie, mais ils doivent parler d'une seule voix. Et c'est ironique que les agriculteurs sont le plus grand segment de la population dans la plupart des pays en développement. Et ils produisent la nourriture qu'on mange tous, ce qui souligne leur importance. Ils demeurent les plus pauvres, les plus marginalisés. Et l'agriculture que nous faisons maintenant pour les jeunes et les femmes, c'est terrible parce que comment est-ce possible que ce soient eux les moteurs du développement, du changement de l'alimentation, et ils demeurent les plus pauvres ? Donc, il y a quelque chose qui ne marche pas dans notre mode de développement, quand on parle des femmes ou des jeunes agriculteurs, entre les différents acteurs de la chaîne de valeur, c'est une question de distribution des risques et des résultats, des bénéfices. Les risques incombent principalement aux producteurs et ce sont aussi eux qui ont les rendements les plus faibles. Et plus on remonte vers le haut de la chaîne de valeur, les profits augmentent. Donc c'est encore une fois une question d'équilibrage des pouvoirs. Et si on ne change pas ça, on va en rester là pendant longtemps. Il faut parler d'une nouvelle génération d'agriculteurs. C'est fondamental pour beaucoup de raisons. On est là pour parler d'entrepreneuriat. Et quand on parle d'entrepreneuriat, ce n'est pas le fort de tous. Il faut différencier les catégories d'agriculteurs. 25 % de l'excès de temps agricole est comptabilisé par la majorité. Donc, il faut véritablement que les experts prennent cela en charge.
[Rajini Vaidyanathan] Très intéressant. Vous avez résumé cela en disant que certaines des personnes qui créent la nourriture qu'on mange tous sont parmi les plus pauvres du monde et les plus mal nourris du monde. Et c'est terrible de dire cela. Monsieur le Ministre Diagne, que font les gouvernements pour faire en sorte que les gens qui produisent notre alimentation soient eux aussi bien nourris et que la nourriture qu'ils produisent leur soit aussi accessible, et qu'ils soient aussi payés et qu'ils obtiennent les bons prix pour ce qu'ils produisent ? Que peut faire votre gouvernement ?
[Mabouba Diagne] Je vais revenir à ce que disait le président Banga. Il est très important que tout le monde se réunisse. Il faut aider les gouvernements, non seulement pour bien collaborer, mais pour qu'ils élaborent les bonnes politiques et créent les bons incitatifs. Par exemple, l’IDA a aidé les gouvernements à dérisquer l'IFC pour réappuyer le secteur privé pour que le gouvernement puisse aider à réaliser le potentiel des partenariats publics-privés. En réunissant toutes ces sources, y compris l'assurance, on a tous les ingrédients pour donner l'appui nécessaire aux petites exploitations agricoles pour qu'ils aient accès à de bonnes semences, de bons intrants, la mécanisation, le renforcement des capacités et l'utilisation de la technologie pour leur permettre de produire de la nourriture non seulement au prix les plus concurrentiels, parce que sans la concurrence et la productivité, nous allons continuer à investir sans résoudre le problème. Ça, c'est la première chose. Deuxièmement, il faut pousser les gouvernements africains à investir l'argent. La plupart des investissements, là où il y a des priorités, nous essayons de résoudre beaucoup de problèmes, mais c'est comme donner un médicament inexact à quelqu'un qui est malade. Il faut impliquer le secteur privé qui peut offrir beaucoup de possibilités et des solutions durables.
[Rajini Vaidyanathan] Ce que Ishmael dit s'applique aussi au travail que vous faites. Si les salaires ne sont pas attrayants, si les gens ne voient pas un avenir viable dans l'agriculture, ça ne marche pas. Donc, comment attirer des jeunes agriculteurs ? Il y avait une époque où une ferme était simplement léguée à la prochaine génération, mais maintenant, il y a des jeunes agriculteurs qui cherchent à faire de l'argent et qui doivent être convaincus que c'est une carrière viable.
[Ayodeji Balogun] Ça revient à la productivité. Nous pourrons, dans quelques années, augmenter la production de quelque 50 %, donc c'est attrayant pour les jeunes. Là, il faut voir quels intrants il leur faut, étant donné la terre, la récolte. Deuxièmement, il y a la question d'accès. Souvent, les agriculteurs savent comment faire fonctionner leur exploitation, mais ils n'ont pas l'argent nécessaire pour acheter des semences ou de l'engrais. Donc, ils doivent avoir l'appui au bon moment. Troisièmement, comment est-ce qu'on peut les aider à s'adapter au changement climatique ? Il y a quelques semaines, la partie sud-est du pays… [pause] Je veux dire, il y a 20 ou 30 ans, la partie la plus productive du pays était différente. Maintenant, elle s'est déplacée. Peut-être à l'avenir, c'est au Libéria qu'on va avoir des exploitations de noix de coco. Il faut aider les agriculteurs à mieux s'adapter, à planter les bonnes semences, et faire ce qu'il faut pour les conditions qui les entourent. Il faut également voir comment organiser les agriculteurs. Un des plus grands défis, c'est que des exploitations qui ont la grandeur d'un terrain de soccer, de football, c'est ça l'exploitation. 80 % de nos agriculteurs ont vraiment de très petites fermes. Donc, comment nous assurer de joindre ces agriculteurs pour avoir le bon impact industriel et commercial ? Il faut donc réfléchir au modèle de l'avenir des agrégations des petites et moyennes entreprises qui font venir la technologie, les finances, l'appui et parviennent à joindre ces agriculteurs. Comment allouer nos ressources pour augmenter la croissance dans ce secteur-là ?
[Rajini Vaidyanathan] Ishmael, je reviendrai à vous, mais avant cela, je vais demander à Divya de nous donner la perspective de l'Asie du Sud-Est. Comment encourager les jeunes dans des pays comme l'Inde où il y a beaucoup de jeunes gens à éduquer ? Comment les encourager à se lancer dans l'agriculture ? Comment faites-vous de cela quelque chose d'attrayant dans le siècle à venir ?
[S. Divyadharshini] En Inde, beaucoup de projets ont été focalisés sur l'agriculture et sur l'entrepreneuriat basé sur l'agriculture. On voit des exploitations dans les régions rurales. La transformation se fait dans les régions urbaines. Si on peut complémenter ces deux systèmes, si on peut créer des chaînes de valeur agricole dans les régions rurales, on crée l'écosystème, on met fin à la migration et on s'assure que l'économie rurale peut être responsabilisée. Il y a beaucoup de projets de transformation rurale qui servent à créer un écosystème permettant aux économies rurales de s'épanouir. C'est ce que disait le président de la Banque mondiale. On veut un écosystème dans les régions rurales qui est propice à l'entrepreneuriat. On ouvre l'accès au marché, on brise les stéréotypes de genre, on s'assure que ce qui était des entreprises seulement exploitées par les hommes soit exploitées par des femmes. Par exemple, dans une petite région, dans Tamil Nadu, en Inde, on voit que les femmes ont maintenant des compétences. On a renforcé leurs capacités et elles sont en construction. Elles ont appris des connaissances. C'est ce que la politique gouvernementale et le renforcement de capacités ont fait pour éliminer ces obstacles. Comment renforcer leurs capacités ? J'ai parlé d'une économie d'entrepreneuriat. C'est ce qu'on a fait au Tamil Nadu. On a créé 11 collectifs de producteurs femmes qui assurent que les femmes peuvent prendre les décisions qui sont bonnes pour elles. Ce ne sont pas les hommes qui prennent ces décisions. C'est comme ça que commencent la responsabilisation et l'autonomisation. Et je pense que de là, ils auront l'essor qui leur permettra d'avancer toutes seules.
[Rajini Vaidyanathan] Un travail inspirant à Tamil Nadu. Ishmael, nous avons beaucoup parlé du fait qu'il faut apporter des changements, que ce soit donner une voix aux femmes, que ce soit la technologie. Vous représentez des syndicaux, des millions d'agriculteurs qui souvent doivent résister au changement. Que vous disent-ils au sujet de leurs priorités quand vous leur parlez de changement ?
[Ishmael Sunga] Merci. Avant cela, je vais revenir aux deux réponses que nous avons entendues et le lien avec notre travail. Oui, nous devons changer la façon dont nous abordons la question d'attirer les jeunes vers l'agriculture. Nous nous y prenons de la très mauvaise façon. D'après moi, nous ne pouvons pas vendre l'agriculture. Il ne faut pas essayer de vendre l'agriculture. Il faut vendre des possibilités d'entrepreneuriat. C'est ça qu'il faut vendre. Quand on voit une ferme, ce n'est pas très attrayant, mais quand on comprend les possibilités que cela offre, les jeunes sont très enthousiastes. Il y a toute une masse qui n'a pas dû être persuadée. Et la plupart de ces jeunes ne viennent pas du secteur agricole, ils viennent du secteur pharmaceutique, d'autres industries. Ils ont vu des possibilités, donc ils s'y lancent. Certains entrent même dans l'atténuation et l'adaptation. Ils ont vu des possibilités. Donc, vendez des possibilités, ne vendez pas la ferme, vendez la possibilité d'entrepreneuriat. Il y a une toute nouvelle génération que nous appelons des agro-entrepreneurs et ils sont formidables. Ils font les choses de façons différentes et nouvelles et c'est l'ambition qui les pousse à réaliser des bénéfices. Si vous ne vendez pas ce qui les attire, vous n'arriverez nulle part. Mais quand ils sont attirés vers l'entrepreneuriat, il y a toutes sortes d'avantages, comme l'atténuation et l'adaptation climatique. Par exemple, il y a une jeune femme qui fait quelque chose de très simple. Elle produit du miel avec des abeilles, bien sûr, mais elle a fait des choses que nous trouvons fascinantes. Elle loue des arbres de ses voisins et les paye en argent comptant et en miel chaque mois. On peut donc mettre ça sur une plateforme numérique. On parle de joindre les agriculteurs. Pourquoi est-ce qu'il faut joindre les agriculteurs ? Les agriculteurs peuvent joindre les entrepreneurs. Il faut tirer profit de la technologie numérique pour mettre fin à cette fragmentation et offrir des propositions aux entreprises. Pour moi, les possibilités sont sans limites. Nous investissons dans les mauvaises choses. Il faut investir dans l'entrepreneuriat qui n'est pas tout à fait axé sur l'argent, sur les engrais, sur les semences. L'entrepreneuriat, c'est une idée. On leur vend l'idée et la confiance. Et le résultat, c'est des emplois. Donc, on aura une prochaine génération d'entrepreneurs.
[Rajini Vaidyanathan] Malheureusement, il ne nous reste pas beaucoup de temps. Oui, c'est vrai, c'est dommage parce que je pourrais vous écouter toute la journée. Merci beaucoup. Je pense que ce que vous avez dit au sujet des petits producteurs de miel, c'est tout à fait vrai. Par exemple, la dame avec qui vous travaillez, les jeunes entrepreneurs. Tant de possibilités. Malheureusement, il ne nous reste plus de temps, sinon je serais heureuse de continuer. Merci à vous tous d'avoir partagé vos réflexions. Merci. Maintenant, il nous reste un dernier groupe. Nous allons maintenant parler de la dimension environnementale de l'agriculture et de l'agroalimentaire. Nous avons déjà parlé un peu de changement climatique, mais regardons quelques chiffres. L'agriculture et l'alimentation contribuent à un tiers des gaz à effet de serre. C'est plus que les émissions de l'ensemble de l'électricité du chauffage dans le monde. La déforestation dans le monde représente quelque 11 % des émissions totales de CO₂ et 90 % des émissions dues à la déforestation sont des émissions de gaz à effet de serre, causées par exemple, par l'expansion de terres cultivées et de pâturage. Les investissements annuels devront être multipliés pour atteindre quelque 260 milliards d'euros par an et cela réduirait de moitié les émissions du secteur agroalimentaire d'ici 2030, ce qui nous aiderait à approcher la carboneutralité. Ceci nous aiderait à augmenter le retour sur l'investissement de 4 300 milliards. C'est un retour sur notre investissement de 16 pour un. Maintenant, je présenterai notre dernier groupe. Rania Al-Mashat, ministre de la Planification, du Développement Économique et de la Collaboration internationale pour l'Égypte. Bonjour. Et Simone Tebet, ministre de la Planification du Brésil. Il y aura l'interprétation pour la ministre Tebet. Merci. Nous avons parlé du changement climatique ce matin, mais entrons dans les détails. Madame la Ministre, le Brésil fait face à des problèmes qui reflètent les choses et les problèmes dans le reste du monde pour l'équilibre environnemental avec la production. C'est un défi, surtout avec l'approche du Brésil, qui est de protéger la forêt amazonienne. Comment atteignez-vous cet équilibre ?
[Simone Tebet] Bonjour, c'est un plaisir d'être ici. Mon interprétation ne fonctionne pas, mais j'ai compris la question. Nous devons nous souvenir du fait que le Brésil est au centre des choses. Nous allons être les hauts du G20. Nous avons la présidence du G20 et nous allons recevoir les BRICS. Il y a une question qu'il faut poser pour les prochaines années : quelle sorte de pays voulons-nous avoir ? Il y a cinq domaines sur lesquels nous sommes focalisés : l'écart entre [inintelligible], les enfants, les peuples autochtones, la durabilité. Le programme le plus important sera ce que le Brésil va faire à moyen terme pour lutter contre le changement climatique. Il y a 80 projets dans notre budget. De ceux-ci, 50 sont axés sur la durabilité. Je suis gouverneur de certaines banques de développement. Nous avons approuvé des projets pour appuyer les États et les villes. Au Brésil, nous avons des indicateurs verts que nous utilisons pour coter les projets en vertu de notre programme de durabilité. La Banque de développement internationale et le Brésil ont deux programmes verts pour l'Amazone dont nous allons parler demain. Nous allons faire une annonce ici pour expliquer ce que nous faisons dans les États amazoniens. Nous annonçons également une plateforme numérique pour notre programme de transition écologique. Nous travaillons avec les trois autres secteurs du gouvernement qui ont signé la politique de transformation verte pour assurer un financement durable pour faire croître notre bioéconomie et notre infrastructure verte. Nous sommes très conscients de la responsabilité du Brésil et ensemble, nous allons faire des progrès.
[Rajini Vaidyanathan] Merci Madame la Ministre. Je vais demander à la ministre Al-Mashat de partager ses réflexions avec nous. Ce matin, Ndidi et Anne disaient que la nourriture doit être une priorité dans la lutte contre le changement climatique. Vous avez reçu une réunion COP à Charm el-Cheikh. Comment pouvez-vous continuer sur cette lancée ?
[Rania Al-Mashat] Oui, merci. L'atténuation a toujours été au cœur de la discussion sur le changement climatique. La transition énergétique a été une priorité dans ces discussions. Nous avons reçu la COP27 à Charm el-Cheikh. Nous voulons rester focalisés sur la résilience, l'adaptation, les systèmes d'eau et la sécurité alimentaire, la sécurité de l'eau. Il faut prioriser ces éléments quand on voit des alliances comme celle dont parlait la ministre au sein du G20, par exemple. Nous avions un fonds de perte et d'indemnisation qui étudie l'érosion de terre en Afrique. Donc, je dirais que la priorité de l'agroalimentaire est maintenant beaucoup plus élevée. C'est une priorité. La sécurité alimentaire doit être assurée. La nourriture doit atteindre les personnes vulnérables. Maintenant, comment pourrons-nous arriver à cette fin de façon collaborative en réduisant les dépenses au minimum et avec un transfert de connaissances ?
[Rajini Vaidyanathan] Merci, Madame la Ministre. J'espère que votre interprétation fonctionne maintenant, Madame la Ministre. Vous avez entendu qu'il faut augmenter la priorité de la nourriture. Vous allez recevoir un sommet à l'avenir au Brésil. Comment allez-vous placer l'alimentation au cœur de cela ?
[Simone Tebet] Nous avons lancé en juillet l'Alliance mondiale pour lutter contre la faim à Rio. Le président Lula a souligné l'importance du rôle du leadership et l'engagement du Brésil visant à mettre un terme à la fin dans le monde. Il a établi cela comme une priorité du programme du Brésil et pas du gouvernement. En termes de coopération, nous allons faire des progrès dans cette voie. On peut apprendre beaucoup des autres pays, pour ce qui est du Brésil, en matière de politiques concrètes, on a beaucoup à offrir aux pays intéressés. Je suis sûr qu'il y a beaucoup de choses intéressantes de l'Inde, de l'Égypte, dont on peut tirer des enseignements. Au niveau du Sud global, ces expériences vont être importantes pour avoir un panier d'un point de politiques pertinentes et chaque pays peut trouver quelque chose qui fonctionne pour sa situation en matière de financement durable. On ne peut rien faire sans cela. Mais il faut créer un monde juste et durable. Pour le Brésil, j'ai deux exemples : l'alimentation scolaire gratuite et de qualité, l'agriculture familiale avec des subventions et bien évidemment, notre programme pour les familles, pour les sortir de la pauvreté, et des ressources pour renforcer les capacités des jeunes et des femmes pour le marché du travail.
[Rajini Vaidyanathan] La ministre, excusez-moi, vient de parler des avantages et la manière dont on peut travailler avec le secteur privé, les initiatives qu'on peut ajouter. On en a parlé toute la matinée, mais j'aimerais avoir votre sentiment là-dessus. Vous avez dirigé le nexus eau-alimentation-énergie pour attirer le financement privé. Parlez-nous de cette plateforme et ce qu'elle a pu permettre d'accomplir.
[Rania Al-Mashat] Les plateformes de pays sont discutées au niveau du climat, du développement. Les pays doivent élaborer leur stratégie en matière de projets susceptibles de faire de l'adaptation, de la résilience et de l'atténuation. [Inintelligible], il y a un pilier eau et un pilier alimentation. Le FIDA, notre partenaire dans cela, prend les rênes. Et ici, l'idée est d'avoir des projets transversaux. On a le Delta et le nord de l'Égypte. Il y a un lien entre les systèmes alimentaires et les systèmes d'irrigation. Pour porter en avant ces projets du côté technologique, ça consiste à investir le secteur privé parce que c'est le secteur privé qui a les capacités technologiques pour ce faire. La plateforme des prêts concessionnels est offerte pour dérisquer certains des investissements privés au niveau des projets importants, notamment au niveau de l'eau et de l'alimentation. Ce que nous faisons avec nos partenaires de développement, c'est une bonne conception des projets proprement dite. Il y a beaucoup de consultations internes qui impliquent les ministères. Parfois, il faut modifier les réglementations pour permettre une plus grande participation extérieure. C'est là l'un des éléments clés de la priorisation, comme l'a dit la ministre. En matière de planification, il faut définir les budgets alloués à ces projets. Dans notre cas, 40 % des investissements publics doivent être verts, ce qui inclut l'infrastructure, l'agriculture et l'énergie. Ce sont là toute une série d'outils qui visent à couvrir tous les points contenus dans ces plateformes.
[Rajini Vaidyanathan] Madame la Ministre Tebet, on vous a entendu parler des plans, des agendas, que peuvent mettre en œuvre les gouvernements en travaillant avec les secteurs privés, mais on en revient à ce qu'a dit le président Banga au début de cette conversation, à savoir comment vous pouvez autonomiser les petits exploitants agricoles sur le terrain, ceux qui travaillent à partir des petites coopératives et organisations d'exploitants agricoles ? Comment vous le faites, cela ?
[Simone Tebet] Cette question est fondamentale, surtout pour mon pays, étant donné qu'au Brésil, plus de 70 % des produits de base que nous consommons, les fruits, les légumes, les légumineuses, ne viennent pas de grands exploitants agricoles. Ce sont des petits exploitants agricoles familiaux. Il est fondamental de partir de là, parce que c'est là qu'il faut avoir des politiques différenciées, des tarifs inférieurs pour pouvoir véritablement aider les petits producteurs. Et ce petit producteur ne doit pas subir l'inflation tel que c'est le cas. Au Brésil, les politiques alimentaires sont importantes. Des centaines de millions de personnes de la planète sont alimentées par l'agriculture brésilienne et il faut véritablement élargir la frontière agricole. On va arriver à un milliard de personnes alimentées par l'agriculture brésilienne dans le monde. Cette question, il faut former ces producteurs, il faut protéger ces producteurs, il faut élaborer des projets plus efficients, efficaces. Et aujourd'hui, il faut aussi avoir un apport financier parce que les investissements vont être fondamentaux pour la transition écologique, pour avoir une production durable. La Banque mondiale, les banques de développement vont jouer un rôle important au Brésil pour le Sud global et pour les rôles des gouvernements.
[Rajini Vaidyanathan] Merci pour vos réflexions, ministre Tebet. J'aimerais conclure en vous posant la dernière question, Madame la ministre Al-Mashat. On parle d'autonomisation des agriculteurs sur le terrain. On en a parlé avec Divya sur l'Inde. J'aimerais avoir votre sentiment pour ce qui est de l'Égypte. Comment asseoir les femmes autour de cette table de discussion ?
[Rania Al-Mashat] Encore une fois, dans notre cas, on a examiné la situation dans différents gouvernorats. Il faut consolider les petites explications agricoles, il faut concevoir des programmes avec le PAM. Par exemple, nous nous concentrons sur la manière de concevoir ce genre de programme en cessant d'utiliser du diesel pour utiliser des panneaux solaires pour les petites exploitations agricoles et aussi renforcer la résistance des cultures. Il y a différents programmes dans ce domaine. Pour cela, les femmes, sans aucun doute, font partie intégrante du point focal de ces programmes. Quand on examine les programmes que nous avons avec l'USAID et autres, on se concentre sur les femmes qui cultivent certains produits comme des entrants de la chaîne de valeur. Par exemple, les pommes de terre avec des grosses sociétés. Ce sont elles qui produisent et la société du secteur privé leur achète leurs récoltes. Donc, le but, c'est d'encourager les femmes à participer à cette chaîne d'approvisionnement et il faut le faire de manière intelligente. Et quand on a des réussites, ça ouvre la porte à davantage d'émulation dans ce domaine.
[Rajini Vaidyanathan] Merci beaucoup à toutes deux. Malheureusement, on n'a plus de temps, mais encore une fois, c'était très intéressant d'avoir ces récits quant à ce que vous faites sur le terrain, quelles sont vos priorités. Ça a été un grand plaisir de vous de parler à toutes les deux et un grand merci. [Applaudissements] Malheureusement, ceci conclut nos conversations d'aujourd'hui. Je ne sais pas ce que vous en dites, c'était fascinant. Il y a eu vraiment beaucoup d'enseignements personnels. L'agriculture, et l'agroalimentation doivent être vraiment au cœur de nos conversations. Les agriculteurs et les femmes doivent être au cœur des politiques. On voit comment les gouvernements équilibrent ça avec le rôle du secteur privé et l'importance de faire tout cela tout en équilibrant le besoin de denrées alimentaires saines et nutritives, tout en tenant compte des changements climatiques.
Merci à tout le personnel qui a participé à cette séance. Certains sont venus des quatre coins du monde. Merci à toutes les personnes qui nous ont suivis en ligne, toutes les personnes en présence ici aussi.
Vous pouvez regarder cette session en différé à live.worldbank.org et continuer à partager vos commentaires et vos réflexions à l’hashtag WBGMmeetings. Merci beaucoup. [Musique]